#anthologie #40quater | Quête du Graal

Elle est antiquaire en retraite. Sa maison, un musée, faïences, mobilier art-nouveau, bibliothèque où les couvertures en couleur de l’éditeur Hetzel donnent envie de relire les Jules Verne, oser les saisir…

Après le café, nous discutons un moment, elle me montre ses deux dernières acquisitions, une édition originale du Mariage de Figaro de 1785, un incunable copié main, rédigé bien sûr en latin, dont la couverture à demi rongée par les rats ne permet de saisir ni le titre ni la date, mais dont le contenu est miraculeusement sauvegardé. Abondamment illustré, chapitres et paragraphes débutant par une lettrine à dorures et couleurs pastel. L’ouvrage est rangé dans un boîtier spécialement façonné par un relieur.

A première vue, il ne s’agit pas d’un texte religieux, mais de récits que les illustrations paraissent rattacher au genre épopée, peut-être au cycle Arthurien aux si nombreuses variantes ; abondantes images de guerriers en armure chevauchant destriers ou palefrois, dames coiffées de hennins, objets symboliques issus du tarot, coupes, épées, deniers… Lulu me fait discrètement observer que le latin employé lui paraît étrange, que ses connaissances en lettres classiques lui font soupçonner un faux. Notre hôtesse propose à Lulu de lui confier le précieux bouquin pour en extraire le synopsis, une confrontation avec quelques références tirées d’Internet devrait lui permettre un début d’expertise.

Le premier jet ci-dessous semble confirmer l’hypothèse d’un faux fabriqué par un habile artisan puis « vieilli » jusqu’à revêtir l’aspect d’un précieux incunable.

Synopsis

  • Naissance du héros encore dépourvu du langage
  • Départ du héros pour la ville de Troyes
  • Voyages au nord et sud de l’Europe
  • Rencontre du héros avec un auteur qui l’emmène en Bretagne sur son cheval
  • Questionnement sur l’existence d’un frère jumeau
  • Rencontre du héros avec un mystérieux employeur (sorcier ?) qui l’envoie espionner un arsenal effrayant
  • Début de rédaction de ses mémoires par le héros
  • Cadre de vie, de travail d’écriture, table, chambre
  • Souvenirs d’enfance
  • Nouveau voyage aux confins de la Champagne, héros assailli, empêché d’atteindre son but
  • Amitiés, compagne et compagnons du héros
  • Dernier voyage, vers Chaumont, en une seule journée
  • Décision du héros de publier ses écrits, sous quel nom d’auteur ?

Lulu n’a pas produit de conclusions définitives, toutefois certains anachronismes (atomique – encore que le terme figure dès le De rerum natura -, moto, téléphone – bien que l’étymologie en soit claire – conscrit, Triumph…) demanderaient un complément d’expertise. En outre, les aspects graphiques, la qualité du papier, les encres utilisées sont sans doute suffisants à un expert calligraphe pour situer les quelques artisans copistes capables de réaliser un tel ouvrage. Enfin, elle s’interroge sur les nombreux points communs existant entre l’ouvrage sans nom consulté et Vies Tranquilles publié récemment par Jean Marigar aux éditions de Monfaucon… affaire à suivre.

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