Ceci n’est pas un livre, c’est un chaos, ça part dans tous les sens. Ça s’écrit en «elle », en « je », en « tu », jamais en « il ». C’est un choix, une constance, aucun narrateur masculin, des personnages oui, mais c’est toujours « elle » qui raconte. Même si bien sûr elle est multiple. Il faut dire que les hommes ont tant mobilisé la parole dans sa vie et dans la vie en général… il faut que ça change. Donc elle n’écrit pas en « il » ou alors peut-être plus tard, dans très longtemps, dans une autre vie. Mais là non. Ce que ça raconte par contre… je ne saurais dire ce que c’est, de quoi ça parle au fond, qu’est-ce qui creuse là-dedans à son insu ? je cherche et je ne trouve pas. Si ce n’est qu’il y a la mer avec son odeur, ses poissons, ses tortues, ses vagues, sa vie par en-dessus, en-dessous et même quand elle n’en parle pas la mer est là qui gronde. C’est qu’elle préfère la mer. Où qu’elle soit elle se demande : elle est où la mer ? elle est loin la mer ? La mer d’ici, de là-bas, de partout, c’est comme une succession de vagues qui traverse ses pages. D’ailleurs où qu’elle aille s’il y a une mer il faut qu’elle rentre dedans, qu’elle la sente autour d’elle. Elle nage au loin, elle ouvre la bouche, la goûte, toujours salée. Mais bien sûr tout ça ne suffit pas pour faire un livre, ni les souvenirs ajoutés, réels ou inventés. D’ailleurs elle n’a pas fait un livre même si c’est quand même de l’écriture, parce qu’elle a écrit, la preuve : elle peut compter les signes, les phrases, les pages et cela l’émerveille tous ces mots qu’elle a posés sur le papier elle qui est restée si longtemps mutique. Parce que peut-être que ce qui compte aujourd’hui pour elle c’est ce chemin dans l’écriture et pas nécessairement arriver quelque part. Il n’y a qu’à voir les pages volantes qu’elle assemble qui ne sont que chaos, qui partent dans tous les sens malgré une mise en page, un sommaire qui pourraient donner l’illusion d’une construction, d’une tenue, d’un projet. Elle, elle écrit, juste ça et c’est l’essentiel et non elle ne veut pas rencontrer d’écrivains, peut-être qu’elle voudrait juste entrer dans leur tête pour comprendre comment passer du chaos au récit. C’est un désir qui la traverse et qu’elle oublie. Elle a tant à faire. Elle préfère la mer.
« Elle préfère la mer. »
total partage.
Merci Françoise
merci !
« ce qui compte aujourd’hui pour elle c’est ce chemin dans l’écriture et pas nécessairement arriver quelque par » Merci pour ce beau texte.
Quel beau texte de « synthèse » de « préface » de l’ensemble (même si je n’ai pas lu tous tes textes)…
Oui la.mer, toujours, et « ça s’écrit en elle » ! Merci Françoise
Merci Françoise pour ce elle, pour ce chaos, pour ce chemin vers l’écrit et comme dit Hugo pour cette fin si belle d’elle qui préfère la mer. Bien à vous.
Merci Nathalie, Isabelle et Clarence pour ces retours qui me touchent !
…. la mer nourricière…qui apaise et met de l’ordre et qui sème le chaos dans la tempête… merci pour ce texte rassurant ( pour moi qui ai parlé de » foutraque » !!) et enthousiasmant pour l’avenir! belle suite à toi avec les mots noyés ou pas dans l’eau!
« Elle écrit juste ça »
ce juste ça qui dit tout, qui nous pousse, et cet émerveillement de voir les mots assemblés, juste ça…
de toute façon le désir de mer la traverse et elle la cherche
superbe élan, Françoise
« Parce que peut-être que ce qui compte aujourd’hui pour elle c’est ce chemin dans l’écriture et pas nécessairement arriver quelque part »
merci Françoise, c’est comme dans la vie