#anthologie #04 | habiter

1:Ça commence avec un lancinant écho, douce mélopée : Allain Leprest en duo avec Yves Jamait « Je le sais, c´est notre Terre Quatre murs, quatre saisons Sont-ils vraiment ma maison? J´habite tant de voyages De creux, de mains, de nuages J´habite des cieux sans bornes Rien qui n´ait vraiment de forme »


2: Vivre et habiter, en français, en allemand il y a deux mots pour exprimer ces concepts alors qu’en anglais je ne vois pas d’autre mots que live. Et que penser du préfixe -in de inhabitants qui peuvent être innombrables lorsque l’inhabité évoque la désertion


3 : Tandis que Leprest et Jamait s’interrogent : « y suis-je bien à ma place ? » pied-à terre, piédestal la surprise du regret de mon ami H., qui au seuil de sa sortie de vie, reniait cette maison qui faisait pourtant l’admiration de tous ceux, nombreux qu’elle accueillait, à une croisée de chemin, il avait fallu choisir entre la maison ou le voilier, et le foncier l’avait emporté sur le rêve: il s’était retrouvé emprisonné, périmètre restreint…


4 Ce besoin de certain de nommer leur maison, pourquoi cela ne me plaît sur les anciennes villas, qui gardent leur superbe quand elles réussissent à se dissimuler au creux d’une ville ou en pleine campagne et me porte à rire dans d’autres cadres , se souvenir de cette longue route au bord du lac à Versoix où toute vue sur le lac est bouchée par de prétentieuses habitations aux noms que je m’étais promis de noter sur un carnet, pour un poème incantatoire et vengeur envers ces cachottières exposant de plus ou moins ronflants patronymes.
Mais vivre route du bout du monde ou rue de toutes-âmes serait une adresse qu’il me plairait de faire mienne sans être sûre que ces quartiers me conviendraient ; ou alors avoir le plaisir d’inscrire cette adresse sur une lettre à un destinataire : un inconnu mais à cette adresse.


5 Habiter, s’habituer… Habiter c’est se domestiquer un peu


6 : Je réalise que je n’ai jamais habité seule et n’ai finalement, après avoir occupé trois appartements différents, été partie prenante dans un seul déménagement : celui qui m’a fait quitter le centre-ville de Lyon pour vivre à la campagne.


7 : Être habité, hanté, possédé..


8 Combien de temps Francesca Woodman passait-elle dans les demeures de Rhode Island où elle se dissimulait derrière rideaux ou tapisseries , faisait corps avec le lieu ?


9 : Je vois parfois passer des photos de réseaux d’urbex ; explorer visiter l’inaccessible, ces friches publiques croisent parfois la sphère privée. Photos poussiéreuses de lieux abandonnés sans être vidés des traces d’habitation, je repense à cette maison abandonnée devant laquelle nous passions à pieds, lorsque j’étais enfant, toit effondré, un salon contenant encore quelques objets abandonnés, poussiérieux, délavés et la végétation qui commençait à reprendre ses droits. Repeupler l’inhabité.


10 : résidence secondaire , principale, emménager, déménager, quitter les lieux, état des lieux, loger, se reloger, s’installer , poser ses valises, faire son trou, s’enraciner

A propos de sophie grail

Après une grande vingtaine d’années en région lyonnaise, vis depuis bientôt une petite entre Léman, vallée verte et blanches montagnes... sans renier racines ardéchoises et tête en terres corses, balinaises ou cévenoles... dévoreuse ou passeuse de livres, clame haut et fort les mots des autres ( accompagne aussi depuis quinze ans les élèves de CM2 à jouer avec les leurs et en apprivoiser d’autres) sans jamais trop extérioriser les miens (sauf en labyrinthiques cérémonies secrètes). Alors sourire de me livrer en tiers-livre sans pseudo ni hétéronyme ... (Interviens discrètement sur Facebook via Sophie Sopibali)

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