Les toilettes publiques pourraient former une très jolie collection.
Je crois bien connaître toutes les toilettes de tous les endroits où je suis allée et je pense même me souvenir de mon premier pot bleu et de toutes les vasques sur lesquelles je me suis posée car en tant que grande buveuse d’eau, je me dois de toujours savoir où je pourrai me rendre si besoin était et je pense même que j’aurai du prendre des photos pour cette collection afin de pouvoir vous les décrire très précisément. Celles qui m’ont le plus marquées étaient lors d’un voyage en Inde, où après plusieurs heures d’avion où j’avais visité celle exiguë de l’appareil en priant pour que l’on ne s’écrase pas à ce moment-là, je m’étais installée dans une petite pièce aux murs noirs de l’aéroport et m’étais rendue compte, tardivement, qu’il n’y avait pas de papier mais seulement un seau d’eau. Plus tard, dans la journée, celle de l’hôtel où j’avais eu le malheur, en pleine nuit, d’allumer la lumière pour découvrir sur les murs, cafards, moustiques et autres insectes indescriptibles qui grouillaient dans toutes les directions. Les toilettes, toutes en miroirs, d’un grand hôtel en Suède, qui m’avait été offert en échange d’un retard d’avion, toutes en glaces, de la tête aux pieds et où tu ne savais pas comment t’assoir pour ne pas absolument mais absolument pas tout voir. Les toilettes des vieux trains qui n’existent plus maintenant, les petits gris, comme on avait coutume de les appeler et qui n’étaient pas si désagréables : de couleurs blanches, des éviers creux et ronds et ce savon en paillettes qui se mélangeait difficilement aux quelques gouttes d’eau jaillissantes du robinet en fer. Celles des trains Sncf et Ouigo, plus modernes mais pas toujours très propres ni en état de marche, pour lesquelles, j’utilise toutes les stratégies possibles et inimaginables pour m’y rendre sans donner l’impression d’y passer mon voyage en entier. Les toilettes touristiques de la gare de Lyon, Montparnasse, Saint Lazare dans lesquelles il faut donner un euro en espèces, carte bleue et même avec ton téléphone pour avoir le droit de passer le barrage du tourniquet et qui, ô bonheur, te fait gagner un euro pour acheter un de leurs produits à consommer (préservatifs, papiers de toilette colorés, tampons, etc.) ! La plus cauchemardesque de toutes est celle située dans le RER C ( ne vous y rendez jamais ! ) où, incapable de trouver le moyen d’en sortir, j’ai cru mourir, pendant le bon quart d’heure où je suis restée coincée à hurler et pleurer et où j’ai réalisé, en sortant, que des tas de gens étaient à côté sur le quai et qu’ils n’avaient absolument rien entendu. Les toilettes turcs sont peut-être mes préférées, bien entendu, la posture n’est pas la plus confortable et il faut de la chance pour ne pas recevoir l’eau de la chasse sur les pieds mais c’est simple et hygiénique. Celles qui m’agacent sont celles où tu rentres et il n’y a pas de lumières, pas de papier, pas de poubelles et où tu es trop pressée pour pouvoir ressortir et râler. Les toilettes des grands restaurants où tout brille, tout est propre, le savon sent bon, les murs sont beaux et où tu te laves les mains sur de véritables serviettes que tu jettes dans une corbeille en osier sont on ne peut plus chic ! Je me souviens particulièrement des toilettes publiques au moment du confinement ; ces cabines dont il faut appuyer sur un bouton pour ouvrir la porte, attendre que le bouton orange devienne vert et dont la couleur bleue t’indique qu’il est en nettoyage ; sans oublier la voix qui te remercie d’avoir utilisé une chasse d’eau plus économique. J’ai encore en mémoire, les minuscules toilettes situées dans une sorte de caravane de tournage, où habillée en robe et crinoline du 18ème siècle, je tentais, tant bien que mal, à soulever la robe, la culotte et attraper le papier, sans abîmer le magnifique costume et toutes celles dans lesquelles, je me suis rendue entre deux scènes de film et où j’ai complètement oublié que je portais encore un micro. L’enfer des toilettes du ferry France-Angleterre qui tangue, des copains et des copines et des livres qu’ils y lisent, celles où tu y travailles comme petit personnel à côté de celles pour la clientèle, celles que j’ai nettoyé, celles après des soirées arrosées, celles dans lesquelles tu pleures, celles des collèges et des lycées sans papiers et sans portes qui se ferment, les sèches au milieu des champs, les tristes dans les cimetières, les dégueulasses, les pas discrètes, les cachées dans les parkings et supermarchés, les natures forêts et parcs et toutes les autres à découvrir.
De l’humour le matin, ça fait du bien! Sans compter la découverte des toilettes du monde et la mémoire collective: Merci Clarence! Un texte joyeux!
Merci Valérie, oui joyeux que j’aurai pu peaufiner un peu plus mais que j’ai écris effectivement dans la joie A bientôt.
Voyager de cabinets d’usage en cabinets d’usage, toujours si proche du corps, de l’expérience frontale et si bien documenté . J’ai ri aussi et ça fait du bien . Merci Clarence
Merci Nathalie pour cette lecture et ce retour si précis. A vite.
La crinoline, ça sent vraiment le vécu et pour avoir porté ça et corset, je vois bien la difficulté.
Cette collection inattendue m’a rappelé l’épisode des pires toilettes d’Ecosse dans le film Trainspotting. Désolée pour cette référence ^^
Ah oui Perle Trainspotting mon dieu ce film magnifique et terrible. Merci pour ton regard et vive les crinolines. Bises.
on ne se lasse pas de lire sourire aux lèvres cette succession de cabinets d’aisance très imagée, un sujet qui nous concerne merci
Merci Raymonde pour votre message.Je ne suis pas encore revenue à relire les textes mais je vais le refaire bientôt avec plaisir avec les vôtres. Bonne journée.