#anthologie #39 | collection de grottes

Dans les grottes de Payerne, des assassins nazis avaient brûlé les vêtements du juif qu’ils avaient dépecé pour faire plaisir au Führer quand il arriverait. Nous allions nous y promener le dimanche quand nous n’allions pas aux kanes à Dzoliè ou aux grottes de la Madeleine, au-dessus du lac de Schiffenen, à même la falaise, après avoir franchi le pont de Grandfey où nous passions sous le train où nous criions pour entendre la résonnance, mais la grand-mère évoquait tous les jours une autre grotte, celle où la Sainte Vierge était apparue à une bergère, la grotte miraculeuse de Lourdes où l’on se rendait en pèlerinage pour soigner toutes les blessures, mais ce n’était qu’un mensonge, une ombre qui s’agite sur la paroi de la caverne de Platon, dont on se demandera à jamais où elle se trouve, comme on se l’est demandé en visitant Lascaux II, la grotte d’origine ayant été fermée au public qui en effaçait les fresques, comme dans ce métro romain de Fellini, autre grotte creusée sous la ville, dans les catacombes, grotte hantée comme la grotte à Pétaule, un de ces trous de par chez nous dont on ne sait pas trop lequel c’est, celui près du creux de la Chetta, peut-être, et il y avait eu aussi, la grotte de Réclair qui s’arrête pile à la frontière et que nous avions visitée masqués, la buée des lunettes nous empêchant d’admirer stalagtites et stalagmites, et le lac souterrain de Saint-Léonard, les barques qui nous y emmenaient comme en enfer, et la fête de la grotte, à Wallenried, où il nous avait semblé qu’il pleuvait jusqu’au fond de l’antre et toutes ces grottes où avant nous des humains avaient gravé on ne sait quoi on ne sait pourquoi, des mythes qui racontent qu’un jour les hommes et les animaux sont sortis des entrailles de la terre pour explorer le grand jour et que c’est en souvenir des temps de ténèbres qu’ils avaient dessiné des chevaux, des cerfs, des aurochs, dans les grottes de Chauvet, d’Altamira, de Tautavel,  et qu’ils avaient, bien des millénaires plus tard, gravé leurs noms sur ces murs de molasse en dessous du Grabou.

A propos de Vincent Francey

Enseignant, chanteur et clarinettiste amateur, je vis dans la région de Fribourg, en Suisse, et suis passionné de lecture et d'écriture depuis toujours, notamment via mon site a href="https://www.lie-tes-ratures.com/">lie tes ratures mais aussi sur un blog né à la suite de l'atelier d'été sur la ville : fribourgs.com. Auteur d'un livre autoédité, Je de mots, dictionnaire intime, je suis également présent sur YouTube pour, entre autres expérimentations, y parler de mes lectures.