« Le temps qu’un cheval batte la queue », disait le grand-père, quand les autres parlaient d’éclair.
Assise sous le pommier, car debout je ne tiendrais pas le temps que les laquais harnachent le cheval pour la parade de Lugnasad. Les pendeloques sont d’or, la pierre de jade sur le front de l’animal est le signe ancestral du dieu, le bandeau que l’on ajuste tout le long de son flanc a des broderies de fil précieux. Assise, car debout déjà trop longtemps je me suis tenue pendant que mes suivantes ajustaient sur ma taille la ceinture de cérémonie, assise et le cheval bat la queue sur ses flancs.
La durée d’un éclair n’existe pas pour nous. L’éclair n’est pas de notre monde. Tu n’as pas le temps de le voir passer.
Je regarde attentivement. J’ai le temps. Le cheval contracte le croupion pour éloigner ses longs poils de crin noir de sa croupe fauve. En place de queue, ce que j’ai, moi, en bas du dos, ce qui me manque, je me le demande..Et si le balancier d’une queue pourrait m’aider à moins boiter.
Les tresses qui ont attaché mes cheveux ce matin, si je les défais il restera des mèches qui sont comme celles qui se lèvent et qui battent les flancs du cheval qui bientôt va porter ma personne empêchée de marcher droit toute seule.