#anthologie #36 | étiré

(entre #anthologie #06 | Mon seul et #anthologie #18 | figer)

Lever le corps, de léger à lourd, de sol à plus haut, extension. Ça va vite autour, on téléphone ses rendez-vous, les épaules brusques frayent, les épaules dures claquent, le temps compte, le temps compte là aussi mais retournement lent du torse sur avenue lièvre, retournement lent du corps car la foule cache la route à prendre qui est, retournement lent de l’autre côté, entraperçue entre deux mâchoires cassées, deux mâchoires à croquer vite, et projection lente du corps dans cette nouvelle direction à prendre contre-courant, temps lent du corps contraint, maintenu non pas en arrière mais en dedans, lest à l’intérieur du corps identifié par ce seul, cette entorse, ce plomb, cet entre-deux où il se trouve, malaxé poreux, et qui retient, par dedans, avant de plonger dans cette autre route, retournement lent du corps encore qui livre son intention d’aller là-bas, après fendre le cours, après fendre l’écoulement fou de corps à rythmes, après fendre et interrompre le flot des autres, et s’identifier seule, ici, nue de seul, nue à voir, pourtant pleins mais seule, et cet instant à figer la chevelure encore en mouvement, de gauche à droite, le visage flou de ralenti, et tandis que la foule devient masse, ce corps présent et flou devient net, ce corps présent et flou se contorsionne, tord, poignet défense, devient épaule aussi mais translucide, mais brouillé de temps pour passer au travers, et étiré, et même en plusieurs fois, se retrouve à l’embouchure, lesté de nouveau, entier, seul.

9 commentaires à propos de “#anthologie #36 | étiré”

  1. Sans connaître l’avant l’après on se glisse facilement dans cet intervalle on se laisse porter et on imagine tout le potentiel. C’est géant.

  2. Une image dingue de ce corps de solitude à travers le flou de la multitude, un corps entier qui prend forme sous nos yeux, fragments par fragments, dans la masse des autres corps. Un poème ultra puissant ! A poursuivre de toute urgence car immense potentiel (suis d’accord avec Cécile) ! On aurait envie de te l’entendre dire (peut-être sur un zoom prochainement ?) Merci Nolwenn !

    • Merci beaucoup Camille, ton message fait chaud au coeur, j’y ai été à l’aveugle, contente que ça fasse écho;)

  3. Et le rythme de tes phrases qui accompagne la lenteur de ce corps omniprésent. Très joli, merci Nolwenn.