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De la terrasse on les observe serrés les uns contre les autres une masse compacte rythmée unie par la marche. Ils avancent lentement pliant sous le poids de la croix en bois, des gouttes de sueur perlent sur leur front glissent le long de leurs joues. Sur les pavés, les dalles la via Dolorosa ses murs de pierres couleur du désert station V Simoni Cyrenaeo Crux imponitur des lettres gravées usées sur la traverse du portail. Baskets aux pieds tee shirts floqués JERUSALEM casquettes vissées sur leur crânes, l’un d’eux lèvent les yeux regarde mon appareil photo caméra à la main. Le clic d’un obturateur.
J’avance courbé écrasé par ce bout de croix, elle pèse elle vit presque sur mes épaules mon dos et vole mon souffle la chaleur chape invisible me serre m’étouffe les odeurs se mêlent mes mains douloureuses desserrent la prise, sous mes pieds le pavé brûle comme une menace comme un feu qui monterait et dévorerait. Jésus avançait-il trébuchait-il de cette même fatigue.
Rejoindre tourner autour, retrouver mon rédempteur et grapiller quelques images, dans cette ruelle étroite où les boutiques s’alignent se répètent. Icônes cricifix chapelets, sujets religieux une infinité. Ils sont peut- être une vingtaine, autour de la station V ils posent la croix quelques instants comme Jésus a été aidé par Simon de Cyrène à la porter.
Chants de psaumes a cappella en italien
A chaque station je pousse je frôle quelques visiteurs. Pas de place, pas assez de place dans ces ruelles où le temps semble s’étirer se perdre dans les méandres de ce labyrinthe vouté, je caresse j’embrasse les pierres. Ici vendeurs habitants touristes se mêlent se heurtent presque, leurs voix aux langages bigarrés se superposent. Soutanes, bures côtoient talits blancs tsitsits qui volent kamilavkion, koukoulion noirs tout se fond. Je porte ma croix pour me laver me racheter de quelques défaillances, faiblesses passées, quelques errements. Juste de quoi recommencer…
Voudriez-vous une photo ?
Musique au loin, une cantate