C’est le matin. La caméra zoome très lentement sur une fenêtre ouverte au-dessus d’un évier. On distingue le plan de travail sombre, les carreaux de faïence blanche qui encadrent la fenêtre, les montants de bois couverts de peinture écaillée.
Voix off : Quand on vit seule dans une ville touristique, les vacances d’été sont un moment difficiles à passer.
Le rectangle de la fenêtre occupe toute l’image ; on voit le mur de la maison d’en face et sa fenêtre ouverte situé à la même hauteur a demi masqué par un voilage et au loin une salle à manger bourgeoise. Sur le rebord de la fenêtre, les pies ricanent en se disputant les restes des croquettes du chat.
Voix off : Alors que les vacanciers coulent des jours insouciantes et faciles : plage, apéro et dodo, la routine du citadin solitaire semble plus déprimante que jamais.
La caméra suit les ombres des voltiges acrobatiques des martinets sur les murs. On entend leurs cris brefs.
Voix off : Autour de lui, tout est mouvement, musique et énergie. Dans son appartement désert ne résonne que le cliquetis léger des grains de lin tombant dans le yaourt, le métronome sec de l’allume-gaz, le rot étouffé du brûleur qui démarre, le bouillonnement crachoteux de la cafetière marocaine.
La caméra longe dans la cour intérieure puis lentement balayé la rue animée. On entend les bruits de la circulation, des voix mêlées.
Voix off : Il s’ennuie. Il s’apitoie. Il aurait pu partir lui aussi au lieu de mijoter dans son jus cafardeux. Il n’en veut à personne mais se reproche d’avoir trop tôt renoncé aux plaisirs des vacances. D’avoir cru ce qu’on lui a dit souvent : quelle chance, vous avez de vivre ici !
La caméra remonte sur un gabian perché lançant un ahanement grossier.
(ça ira mieux – en général après le 15 août – mais en fait non)