En entrant dans la chambre pour refaire mon pansement, elle a marqué un temps d’arrêt en me fixant bizarrement, avant de dire, c’est vrai, c’est tout à fait ça, vous ressemblez comme deux gouttes d’eau à Blaise Cendrars, la coiffure en brosse, la forme du visage, le coup d’œil entre dédain et provoc, le crayon au coin du bec, bon lui c’était le mégot, alors le crayon c’est mieux. Là, juste quand je suis rentrée, vous étiez son portrait tout craché. C’est mieux votre plaie ce matin, la douleur, c’était comment cette nuit ? Difficile. Je vais en parler au médecin, et vous avez déjà entendu parler de Blaise Cendrars ? Oui, j’ai entendu le nom au lycée, mais pas vraiment fait attention. Il était écrivain, c’est bien ça ? Oui, rien lu non plus, mais ma collègue C., celle qui est blonde avec les cheveux raides, elle lit beaucoup et elle nous a montré une photo de Cendrars. Elle vous a surnommé Blaise, c’est toujours mieux que chambre 107. C’est sympa Blaise j’accepte le surnom, ce sera toujours mieux que mon vrai prénom, B., une idée de ma mère il parait. Ça n’a pas dû être simple à l’école. Oui, en plus l’école c’était pas trop mon truc, plutôt le grand air. Le dessin aussi, surtout les oiseaux, bon maintenant le dessin … Vous devriez essayer de lire, Cendrars par exemple, maintenant que vous vous appelez Blaise, vous n’avez plus le choix dit-elle en sortant avec son matériel à pansement et son thermomètre