#anthologie# 33

#anthologie# 33 le mot phrase de la fin vengeance par jean Yves LEBORGNE

Cicatrices, douleurs et regrets

Dernier regard d’où elle a extrait toute émotion au loin vers la ligne démarquant le ciel de l’océan, plus près les taches rouge vif des flamboyants, la maison qui l’héberge les surplombe dans la luminosité d’une belle matinée qui n’adoucira pas son cœur,  

Ces paysages changeants, incertains, ce littoral dégradé par échouages de Sargasses perturbations climatiques ont tout abimé, les incivilités aussi ; quelques ilots de beauté préservés pour combien de temps encore ? Cicatrices des paysages, excavations comme des caries les carrières de tuf au détour des virages.

Son cœur malade, suites opératoires compliquées, séjour en soins intensifs, miraculeusement sauvée du choc infectieux et du germe nosocomial qui s’est greffé sur ses valves cardiaques.

Plus rien à perdre regrets non, vie finie. Désir de vengeance

Restaurer sa vie, revenir en arrière, impossible, cœur défectueux, amours impossibles, un corps enlaidi de cicatrices, cicatrices à l’âme anciennes stigmates de bistouri maléfique, cicatrices de l’esprit, souvenirs-cicatrices ouvertes

Couper à son tour, infliger à son tour des cicatrices idée fixe dans ses douleurs et blessures seule issue possible pour son esprit encore plus dérangé maintenant, douleurs psychiques, douleurs chroniques, migraines terribles, moral altéré pour toujours, délire et idées fixes, la beauté des sites l’indiffère, la beauté des gens l’insulte

Sa vie ? compromise par la faute d’un système de soins destructeur, qui broie sans pitié ou qui occulte ce qui est différent.

Les esprits malléables sont manipulés par les médias, l’obsession à consommer et à faire consommer au détriment de sa santé et de son budget. Le soleil les plages produits de consommation

Cicatrices nombreuses : les seins, le nombril a été refait, le ventre théoriquement remodelé, son psychisme fragile et négligé par un système carencé, désert médical, déni.

Tranquillement l’idée de vengeance a fait son chemin

Par la vitre baissée du vieil SUV les bas- côté envahis de mauvaises herbes, les poubelles non ramassées défilent et débordent en ces jours fériés

Arriver devant l’entrée du bourreau à la gueule souriante.

Camoufler son sabre

  #5   Le sabre ne luit pas car la lame par les deux faces de son aplati, s’est évidemment assombri. La lame est très effilée, elle s’en assure encore avec le plat de la pulpe de son pouce. 

Elle serre son manche noir et lisse entre ses doigts recourbés il se moule dans sa paume. Il habite tout naturellement sa paume.

    #3    —laissez- moi maintenant, je sais où je nous emmène

Je pousse vers ailleurs, vers mieux je tourne le dos à tout, je vous laisse tous derrière moi

Je ne remercie personne de m’avoir fait ce que je suis, ni mes géniteurs, ni mes thérapeutes.

Qui souhaite sciemment se faire mutiler et dépecer et dépiauter ? proposition de dernière chance que le bourreau consulté à oser proposer

Une fois de plus trahie. Vengeance contre qui ?

Dans leur empressement ils n’ont pas été regardants sur le protocole de préparation pluridisciplinaire et la réglementation

Les cicatrices de son mental sont aussi nombreuses que les traits qui zèbrent son corps mutilé.

Mutilée, elle ne voulait pas « souffrir pour être belle » seulement pouvoir se vêtir de manière plus normale, se déplacer sans être au bord de l’asphyxie, faire taire ses voix.

Regrets inutiles, regrets repoussés espoirs anéantis corps honni, cicatrices indélébiles douleurs j’avais tellement essayé de me faire aider.

Organiser le boycott national des empoisonneurs identifiés ; Ceux dont les logos se sont appropriés (paradoxe et aberration !) la bonne santé Pour être performant et musclé consommez- nous, buvez nos sucres et colorants les panneaux publicitaires font partie du paysage

Nos fast-food sponsorisent des divertissements et animations ludiques pour les victimes qu’ils ont empoisonnés impunément, conviction de ses rares moments de lucidité. Vengeance libératrice vers un ailleurs sans douleurs sans cicatrices

Ses bras sont cicatrices ses jambes à l’intérieur des cuisses estafilades fines et disgracieuses

Attente brève, bras-cicatrice levé, sabre qui siffle, le sang gicle. Vengeance

Elle se réveille en sueurs et hagarde

Jean Yves LEBORGNE

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