Je n’aime pas conduire la nuit J’en parlais encore au diner Il aurait dû partir demain matin Pourquoi est-il parti en pleine nuit Il nous a bien dit qu’il n’aimais pas conduire la nuit Avant de partir Cela pourrait nous inquiéter On ne dit pas des choses pareilles Les phares d’un camion rouge s’approchent de plus en plus pour coller au pare-brise En espérant que ses phares sont bien ajustés parce que je lui ai redit des dizaines de fois de faire quelque chose Décélérer Deux phares blancs dans le rétroviseur gauche injonction à rester sur ma ligne à m’approcher des phares rouges Persuadé qu’ils s’inquiètent et ne seront pas couchés avant mon appel Jusqu’à ne plus avoir de vitesse À se dégonfler La sortie n’est plus très loin Il devrait être arrivé maintenant Pourquoi n’appelle-t-il pas Doubler le camion serait la rater S’incliner Sur son siège dans le noir devant plus gros que soi Les lignes blanches de chaque côté entrent sous le capot Il faut être patient tout va bien se passer Au fond de la rétine même Regarder dans le noir à gauche pour rétablir le champ de vision Tensions d’éveil forcé Épilepsie Se redresser sur son siège plus que quelques kilomètres à parcourir soit une vingtaine de minutes La voix de Waze dans l’habitacle caisse de résonance entre deux analyses politiques sur France Info De toute façon il ne risque pas de se perdre en route Le clignotant et ralentir brusquement L’atterrissage d’un avion de cent vingt kilomètres heure à trente sur une si courte distance et les arbres à droite qui clignotent Du sombre et du orange Tempo Battements du cœur ralentissent Le noir s’épaissit plus personne pour s’éclairer Il faudrait peut-être éteindre la lumière et dormir Soit certain que je ne fermerais pas l’œil tant qu’il n’aura pas appelé Plus personne pour repère Juste le bas-côté creux devant l’aplat noir des champs Horizontales se redressent et deviennent des murs d’enceinte Des murailles de nuit Au milieu une route et sa ligne blanche le véhicule à droite Plein Phare Des insectes Des spectres On pourrait au moins éteindre la télé Des chats aux yeux luisant se retournent et s’enfoncent dans la muraille Dans quelques anfractuosités passagères Tu pourrais allé te coucher, je te rejoindrais Dans la nuit la ligne blanche d’un stop À droite et à gauche un vide sidéral.
C’est très beau Romain, la nuit, les phares, la peur, les lumières, merci.
quel bel entrelacement des deux textes qui n’en font plus qu’un