Une femme porte au poignet un de ces bracelets où l’on accroche des petits pendentifs. Il y a une guillotine fonctionnelle miniaturisée, un poignard affuté et une minuscule hache. Lorsqu’il lui demande si ce n’est pas dangereux, elle se sert de la guillotine pour couper une tige de fleur, du poignard pour ouvrir une noix, mais dit qu’il ne faut pas toucher à la hache. C’est un risque à prendre répond-elle. Il ne comprend pas et se dit que les femmes sont souvent plus fêlées qu’on le pense.
Elle aime les journaux des autres, ceux qu’on retrouve après que leurs auteurs ont disparu depuis longtemps, ceux qui sont envoyés par des anonymes qui vous ont retrouvé par hasard. Elle en a toute une collection dont elle lit parfois des passages. Ce qui l’étonne, c’est qu’elle aurait pu les écrire.
Les catastrophes sont une mine d’informations dont on ne tient généralement pas compte. Cela la fascine. Elle collectionne les analyses (contradictoires) des raisons de leur survenue et les met en récit à côté des projets des rescapés pour reconstruire au même endroit, continuer comme avant, ne rien changer. Chaque catastrophe ne touche jamais qu’un nombre infime d’humains ; les indifférents, les non concernés sont beaucoup plus nombreux que les survivants, alors pourquoi s’en faire ?
La photo de groupe devrait être élevée au rang de catégorie particulière de l’art photographique, alors qu’elle se résume souvent à un alignement de têtes et de corps, les petits devant, les grands derrière, sans plus de poésie qu’un tableau statistique. Elle les collectionne et cherche une solution. La cène, les onze, voilà qui peut donner des idées.
Elle fait des listes de slogans gagnants aux élections présidentielles et conserve les affiches : la paix et la sécurité, la force tranquille, La France unie, La France pour tous, la France en grand la France ensemble, ensemble tout devient possible, le changement c’est maintenant, Ensemble la France, Emmanuel Macron avec vous… Le poids des mots, le choc des photos, une sacrée trouvaille. Elle ne sait pas quoi en faire de ces restes encombrants qui prennent la poussière, elle les jettera probablement un jour. Le jour où il sera possible de vivre ensemble, tranquillement unis dans la paix et la sécurité.