Je suis né le samedi 14 septembre 1991, à Toulon. Mon père était sous-marinier, ma mère s’occupait de moi et du reste. Pour les vacances, nous allions chez mes grands-parents, à Marmande ; les deux familles étaient voisines. Il y avait aussi là mon ami d’enfance, de deux ans mon aîné. Nous avons déménagé à Soissons (dans l’Aisne) en 1996, puis à Saint-Jean-d’Illac (en Gironde) en 2000. Mes parents vivent toujours là.
Pour remplir cet album, je me suis contenté de passer ma cervelle à la batée : je savais que toutes les images qui m’intéressaient étaient saupoudrées d’or.
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De derrière son bureau, Thierry voit une femme avancer sur le chemin, un porc égorgé sur les épaules. Malgré son rôle de sentinelle, il reste immobile. Une fois arrivée devant le baraquement, la femme jette la bête à terre et se présente comme celle qui vient d’assassiner le roi — elle pensait que c’était comme cela que l’on devenait reine, ici. Thierry se décrit comme un chevalier en formation, prêt à en découdre. La vagabonde lui indique qu’elle n’hésitera pas à se servir une nouvelle fois de son poignard, celui-là même qui a éventré un roi malade et un cochon bien gras. Après avoir chargé Thierry de faire cuire l’animal, elle part visiter la grotte que garde l’écuyer depuis des mois sans jamais avoir pris le temps d’explorer, trop occupé qu’il était à compulser le Code des chevaliers. Elle ressort quelques minutes plus tard, la couronne du royaume sur la tête. Après le dîner, elle se lèchera les doigts et adoubera Thierry.
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Un homme sort d’un cinéma, dans une ville qu’il n’a arpentée que quelques heures. Il faisait jour lorsqu’il est entré dans la salle ; maintenant, le crépuscule distord les lignes et les couleurs. Le film l’a touché, ça bout à l’intérieur de lui. Il marche vers la maison qu’il loue pour l’été et, à mesure qu’il avance, se rend compte qu’il ne reconnaît pas la ville qu’il a traversée plus tôt. Une sorte d’angoisse monte dans laquelle les images du film se mêlent à la cinématographie des quartiers qu’il passe. Il retrouve finalement sa maison, sur le flanc d’une colline incroyablement raide. Il rentre dans ce qu’il considérera comme un chez lui pour les semaines à venir, se sert un verre d’eau et scrute l’obscurité du jardin. Il sait qu’un colibri niche là. Sur la vitre, les fougères, son visage et l’intérieur de la cuisine se superposent.