…elle part à l’assaut de la montée du Carmel le regard affolé dans sa robe fleurie et son parapluie et puis une voiture passe alors elle lève le parapluie et le regard accroche qui dans la voiture sans doute ne la regarde pas mais elle sourit et le regard s’apaise et les traits de son visage tout rond se détendent. Elle monte, la sueur perle et des onomatopées s’échappent de temps à autre. Et puis, sans crier gare, voilà que le regard dérade et dérive et dévisse à nouveau. Jusqu’à accrocher un nouveau visage dans la rue. Elle s’arrête. Et le sourire à nouveau, et la rondeur généreuse du visage à qui ne comprend pas ce qu’elle lui veut, et passe son chemin. Elle suit le visage du regard qui descend la rue. Elle continue à sourire, tend la main et tente de faire affleurer des mots. Et elle repart. A l’assaut d’un autre visage.
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Tu aimes l’odeur de pluie et de soleil sur la route chauffée à blanc après l’orage. Tu aimes les odeurs de terre les jours de labour. Tu aimes disparaitre dans la fraicheur des chemins creux les après-midis brûlants d’été. Tu aimes caresser le flanc des vaches, vie chaude et puissante à fleur de main. Tu n’aimes pas quand les enfants partent en colonies de vacances ou chez les tantes de Nantes. Ils te manquent. Tu aimes qu’ils te racontent la mer et la ville à leur retour. En leur absence, tu passes un peu plus de temps dans le jardin avec grand-mère. Et avec les copains dans la fraicheur de la cave.
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Le 8 mars 1972, elle rencontre un homme étrange. Il porte un chapeau haut-de-forme violet et une salopette rouge. Il lui dit qu’il a déjà voyagé à travers des portes. Elle ne le croit pas. Elle ne croit pas les voyages vers le futur, vers le passé, vers d’autres dimensions. Elle sait bien que ce n’est pas possible. Pourtant l’homme lui assure que c’est vrai. Il lui tend une pierre qu’il dit magique. Une babiole qu’on trouve sur les brocantes, se dit-elle. Mais, comme elle trouve la pierre assez jolie, elle la garde et la met dans sa poche. Après cette très étrange rencontre, elle rentre chez elle et oublie vite cette petite pierre.
(Début de roman écrit par mon garçon Gabriel, « babiole » a juste remplacé « machin »…)
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