c’est un cri qui nous précipite à la fenêtre donnant sur le carrefour. un homme crie des insultes dans son téléphone cellulaire parle fort dans une langue que nous ne connaissons pas. à l’autre bout une voix féminine hurle dans le haut-parleur branché et on aimerait tacler ce cri adressé à une femme. l’homme tourne en rond et continue de déblatérer dans un jargon de nous inconnu. des fenêtres s’ouvrent dans le voisinage on entend au loin un cri répondre au premier hurlement cri revenant à son destinataire comme un boomerang. le cri a glissé sur l’homme comme l’eau sur les plumes d’un canard et son langage râpeux nous laisse abasourdis. comment de telles paroles peuvent-elle franchir des lèvres sortir d’une bouche en jets saccadés comme vomissures. la sonnette du bus dans son couloir à contresens retentit les fenêtres se referment étouffant les voix chacun retourne à ses occupations dans un bruit de pantoufles feutrés une chasse d’eau à l’étage un robinet de cuisine. l’homme s’éloigne et avec lui son souffle fétide. les voitures qu’on avait cru suspendues reprennent leur course