C’est une odeur, c’est une ambiance. Faite de tétanie et de hurlements. De cris et de silence. De crises de panique et d’individus très calmes. Le refuge semblait tenir le choc. La gardienne a appelé au clame et demandé de faire de la place pour ceux qui dormaient à l’extérieur. Ils n’étaient qu’une dizaine.
Y a-t-il un médecin ? On s’est rassemblé dans le réfectoire, elle nous a comptés et elle a distribué des tisanes. La liaison radio marchait toujours. Tout se passait en bas. On évacuait les gens des chalets de la Bérarde. Il y avait des chalets ensevelis par les blocs de rocher jusqu’au toit, d’autres éventrés par le torrent les pierres et la boue. Il y avait un médecin qui est resté auprès de ceux pris de crises de panique. Il y avait un prêtre aussi qui a commencé à dire quelques prières reprises par presque tout le monde. L’infusion de thym prend des allures d’encens.
Ça sent l’essence ! J’étais là en 2017, le générateur a été démoli par un rocher. Ça sent le gaz ! ça sent la merde ! les nez s’affolent, détectent, analysent. Ne vaut-il pas mieux sortir et descendre ? En 2017, c’est ce qu’on a fait, à pied au chatteleret dans la nuit noire. L’expert convainc. Les réseaux, les conduits, les liaisons, les fosses, c’est ce qui pète en premier. Certains veulent de la bière, la gardienne résiste « il ne manquerait plus qu’elle soit à la tête d’une panique alcoolisée ». Le gardien de l’époque a eu tellement peur qu’il n’a jamais voulu remonter, c’est à ça qu’elle doit son poste. Devant son refus, Des fioles, des fiasques sortent des sacs à dos, petites, pour les vrais coups durs. ça sent le génépi, le whisky, la chartreuse. ça sent la pluie et les larmes. Le vacarme du torrent est trop fort, on referme la porte et on attend dans le balai des hélicoptères et des faisceaux de leurs projecteurs.
Oui, l’odeur de la peur, terrible. merci Danièle.
Merci Clarence. Un texte que je devrais reprendre et approfondir.