des gens qui dorment, ça ne se trouve pas à tous les coins de rue. Quoique. Pourquoi ai-je écrit ça, alors que tant de monde dort dehors? Je me souviens du travail de Franko B, Still Life, de ses photos de sans abris. La succession des corps allongés, des cartons, des duvets. Je me souviens de Martial que j’ai vu un soir dormir sous la pluie, allongé de tout son long sur le trottoir un bras tendu au-dessus de la tête. Je me souviens de ronflements la nuit dans un recoin entre une haie et un immeuble. Je me souviens d’un homme presque nu l’hiver sur une bouche de métro pas loin du jardin des plantes. Je me souviens de l’endroit où des Russes s’alignaient le long d’une poste. On ne voyait d’eux que des formes dans des duvets, impossible de savoir si leurs traits s’apaisaient dans le sommeil. On ne les voit plus. Des gabions ont pris la place chassant les gens qui dormaient là. Je me souviens des endormis de Carole Douillard autour desquels marchaient les visiteurs. Je me souviens de mon père qui se jetait en travers du lit pour faire la sieste, un bras replié sous la tête, l’autre tendu, une jambe repliée, l’autre tendue. Je me rappelle d’une enfant qui dormait avec un jambe levée à 90°C en appui sur le mur, les deux bras au-dessus de la tête. Je me souviens d’un front blond que je caressais après avoir lu une histoire. Je me souviens d’un pied qui sortait d’une couverture, près d’une bouteille de lait renversée. Je me souviens du lit-cage où dormaient Isidore et Nathalie qui me semblait si petit pour y dormir à deux, mais ils s’y réchauffaient l’hiver collés l’un à l’autre sous l’édredon alors que dehors il gelait à pierre fendre. Je me souviens de trois enfants endormis côte à côte, le visage tourné dans la même direction. Je me souviens d’une main tenue longtemps à l’hôpital, et moi me demandant si cette main avait conscience de la mienne dans son sommeil.
je me souviens de tant de corps endormis, inconnus, intimes, éloignés, disparus
Bonne nuit, ce soir avec Ugo, nous ouvrons le bal des endormis, les siens qui pour un peu ne dormiraient pas, les tiens des plus anonymes au plus intime, la mienne à dormir contre et avec sa bande d’amies, tous font, avec leurs narrateur-trice, du sommeil et de la veille, et des états intermédiaires, une bien forte fiction ! Hâte de lire les autres.
vais les tenir à distance de mon esprit… je passais avant d’écouter vidéo pour me mettre en appétit, y avez réussi et au delà (comme m’y attendais)
nous nous souvenons d’eux (du moins je l’espère et ils grattent notre conscience oh juste un peu poir ne pas nius empêcher de continuer)
merci et bonne journée
… merci pour ce voyage d’un coin de rue à .. l’hopital et entre les deux, un peu de quiétude…la vraie vie… quoi…