Ils dorment
le dos courbé, front posé sur les bras croisés sur la tablette
l’arrière du crâne plaqué à l’appui-tête, gorge déployée et bouche ouverte
la tête penchée vers le magazine tombé sur les genoux
affalé sur l’épaule du voisin
le front sur les genoux remontés sous le menton
un masque noir cache les yeux
la tête ballotée contre la vitre
luttant, la tête s’alourdit, sursaut, se redresse
le dos vrillé, le bras replié contre l’oreille
enroulée dans une écharpe
un gros casque audio comme une anse accrochée à deux macarons d’oreilles
le coude sur la tablette, la joue écrasée sur la main
sifflant à chaque expiration
la capuche serrée jusqu’à hauteur du nez
le visage bleui par les images du film sur l’écran du PC
les lèvres palpitant comme les naseaux d’un cheval rassasié
la main fermée sur le portable
contre un sac à dos gonflé
sur un pull roulé bouchant les ouïes de ventilation au bas du vitrage
postures d’abandon mais demi-sommeil, quelque chose en eux veille, reste tendu
ils dorment, le train roule dans la nuit.