Rue Michel Servet – souvenir lointain
C’était vraiment difficile de trouver une place pour se garer dans la rue Michel Servet. Le parking de la place du marché était proche mais trois fois par semaine, les mardis, jeudis et samedis il fallait enlever la voiture sinon la fourrière. J’avais oublié une fois mais les forains avaient poussé ma voiture. Le frein à main n’était pas bloqué et une 4L, c’est pas si lourd. Ils avaient peut-être été sensibles aux gros soleils jaunes et aux moutons rouges des autocollants « Atomkraft ? nein danke » et » Gardarem lou Larzac « .
On partageait l’appartement du 36 rue Michel Servet avec un autre couple d’étudiants. La vendeuse de la pâtisserie du bas de l’immeuble m’avait prise pour une autre fille, une Marie-Pierre, mon sosie m’avait-elle dit en riant. Quelques jours auparavant, j’avais fait couper mes longs cheveux pour ne plus avoir l’air d’une gamine. J’étais très fière de ma coupe et l’idée d’avoir un sosie m’avait profondément troublée. Je n’étais plus jamais descendue acheter de choux à la crème cuite, pourtant délicieux.
Rue Michel Servet – souvenir proche
Jeudi matin. J’emprunte la voie cycliste à contresens de la rue Michel Servet pour aller jusqu’au marché. Une camionnette garée à cheval sur le trottoir et la piste. Je m’arrête pour laisser passer les voitures en face. Le livreur, vite, sauté du siège portable à la main, glissé la porte latérale et couru avec un sac rempli de colis sur le dos. Je réajuste mon casque, jette un œil au menu de Pitaya, Pad Thaï bœuf poulet tofu ou crevettes, riz blanc parfumé. La porte du 36 n’a pas changé, vitrée et avec des ferronnerie noires, un air art déco comme toutes les entrées des immeubles des Gratte-Ciel. La pâtisserie, un temps transformée en rôtisserie-traiteur est devenue un restaurant thaïlandais sous franchise.