#anthologie #22 | rue du 8 mai

Il n’y a plus la clochette sur le portillon, les couches de peinture que l’on avait appliquées commencent à ressembler à celles d’avant qu’on ne les applique. Une extension — comme une verrue — a poussé depuis la cuisine de la maison. Je ne sais pas si les dalles qui menaient vers le peuplier et le petit jardin de rosiers ont survécu aux travaux. Sur le béton du trottoir, je reconnais toutes les fissures. Elles se sont élargies, mais je les reconnais. De l’herbe, des grilles et des barrières ont poussé côté parking. La porte-fenêtre de la salle à manger a maintenant un cadre en plastique. Les volets n’ont pas bougé ; le pourrissement du bas a progressé. Je crois que les arrêts en forme d’aiguille d’horloge sont toujours là. Chez Alexandre, tout est clos. J’imagine que Christine a fini par partir. Le jardin est incroyablement identique. La bouche d’incendie a également gardé le rouge criard de sa seconde vie.

La peinture du portillon s’écaille. Le levier pour l’ouvrir émet un bruit caractéristique. Il y a de petites boules orange sur la haie, des graviers sur l’allée de béton que mamie Henriette nettoie avec une balayette en osier. Un merle mange les miettes de pain que l’on jette sur les dalles devant le peuplier. On dit que c’est papi René qui vient nous voir. Il n’y a que quelques pas pour aller chez Alexandre. Le béton du trottoir est lisse, sauf de légères fissures. La porte-fenêtre qui donnent sur la salle à manger est composée de deux grandes vitres et de quatre plus petites, ouvragées avec des sortes de rosaces. Le parking est presque désert : on pourra jouer au ballon après le dîner. La vitre de la porte-fenêtre d’entrée de chez Alexandre est grainée. Il y a un autocollant en bas à gauche et des rubans de plastique translucide tombent du plafond. Un boudin empêche l’air de passer. Le portail menant au jardin est en bois peint en blanc. Les planches sont arrondies sur le haut et la forme globale du portail correspond à l’arrondi de ces planches. La bouche d’incendie est grenat de rouille. Après elle et son socle de ciment, le trottoir perd sa surface lisse pour celle d’un goudron émietté.

A propos de François Tastet

J’ai trente-deux ans et j’enseigne les sciences naturelles à Paris. J’ai grandi dans la région bordelaise, près de l’océan. C’est la discipline de fer dont j'habille ma pratique de l’écriture qui apaise mes démons, règle mes journées et me fait voir le beau. Pour écrire, il me faut : lire, aller au cinéma, marcher seul loin de la ville et savoir mon corps capable de mouvements compliqués. Certains de mes textes ont été édités dans des revues à très petit tirage. Je brouillonne dans des cahiers d’écoliers dont on peut consulter certaines pages ici https://cahierdetravauxpratiques.notion.site/Cahier-de-travaux-pratiques-v-2-711e5b0ec46f45889271102f9b69e8e8.

Laisser un commentaire