Ton chapeau d’homme1 qui te donne cet air insolite, femme extravagante à la lisière de genres, comparse de théâtre dans cette famille bourgeoise, assise sur un fauteuil en bois, un grand tableau en biais à l’horizon, tu es dans un salon bourgeois, tes pieds posés sur un tapis persan, tes jambes recouvertes par des bas de contention, l’index de ta main droite posé sur ta joue et l’autre index sur ton ventre qui indique ailleurs, dans ces jeux de lignes ta trajectoire est ailleurs, à la lisière des classes, questi indici che hanno tenuto tanti ditali, dés à coudre, ces index qui ont suivi tant de lignes sous l’aiguille de la machine à coudre2, et oui les index ont été ton outil de travail pendant toutes les dernières années quand avec tes mains tu ne pouvais plus soulever les enfants3, ta petite montre qui surgit sous ton pull clair, ton regard suspendu à celui du photographe4 et maintenant à moi, dans une complicité et un défi sans mots pour le dire5, tes lèvres à peine entre-ouvertes, on voit encore ton geste de tenir le fil sur tes lèvres, tes cheveux grisonnants, les double pull en laine et les rides de ton cou à peine visibles sous ton col roulé révèlent ton âge, oui ton âge est désormais accentué, tu portes sur tes jambes troncs cet âge avancé.
Tes mains et tes bras qui portent ces deux enfants comme des trophées6 on ne les voit pas, mais on perçoit cette force, la tienne. Là tu es une jeune femme. Consacrée. On voit la main de Mara posée sur tes seins, son regard souriant et sa trajectoire vers un ailleurs, et les mains d’Isa qui se tiennent l’une l’autre sous son visage sérieux, corrucciata, tu es souriante Tattà, tes yeux serrés à cause de la lumière forte, tu es avec ces filles, tu es ces filles, tu es à ces filles.
De toi, Tattà, j’ai retrouvé ton nom et patronyme 54 ans après Maria Parisi.
Tu es le nœud des rapports de domination, là où les gens meurent. Là, peut-être, dans ces maisons de retraites d’où il n’y plus de photos. Tu es l’esprit vivant de cette famille, celle qui plonge et sort les autres de la dépression, celle qui tient les enfants, tu es la mémoire au-delà des tabou, tu et le côté obscur de la bourgeoisie, la personne qui a vécu à partir de ses 12 ans avec une autre famille, depuis ton enfance, toute ta vie avec la famille des nonni, sans y être membre jusqu’au bout, sans pouvoir mourir là, et ta vie se termine au début des années 1980 dans une maison de retraite dans la banlieue Nord de la ville, dans une grande mélancolie. De toi, j’ai quelques souvenirs à la machine à coudre, moments de joie et quelques photos.
1. Questa è la prima fotografia. Il cappello è quello di zio Mario, lo zio medico, padre di Marianna e Benedetta, mie cugine adorate. All’epoca si portavano molto i cappelli, ma i cappelli da donna e da uomo erano molto diversi e sicuramente portare dentro casa un cappello da uomo è un segno di libertà, d’infrangimento delle regole che forse in quella casa ritrovavi, un gioco (a fare l’uomo? A fare l’uomo della classe sociale per cui avevi lavorato tutta la tua vita, consacrandoti ad essa completamente?).
2. Dove sono finite le macchine da cucire tue e di Ninni? Dove sono finiti tutti gli oggetti dietro di te nella fotografia? Con tutta la sua memoria e le sue immagini interiori, un mondo di oggetti viene meno alla morte di una persona e tutti questi mondi sono oramai così lontani.
3. Ma credo che avessi finito di occuparti dei bambini già da tanti tanti anni.
4. Il fotografo potrebbe essere zio Mario stesso, dopo averti proposto il suo cappello. Oppure zia Mt, sua moglie, avendoti sorpresa con il cappello in testa. O più probabilmente Benedetta o Marianna mentre giocavate insieme ai cappelli e ai travestimenti e a fare l’uomo in salotto, immerso in una conversazione da salotto.
5. Le parole che mancano per dire questa sfida. Quale sfida? Forse quella del rapporto tra le classi sociali, al tuo essere al servizio, questa sfida intorno alle quali si costruiscono e fratturano le società. Chissà come ti sei difesa rispetto alla lotta di classe, chissà quali sono stati i tuoi pensieri. Sicuramente con il gioco, con il canto, con le risorse segrete della cultura popolare. Anche a me mancano le parole, ancora per dire il privilegio di classe, allargarlo e disfarmene.
6. Questa fotografia è ben più antica, deve essere della primavera o dell’estate 1932. Mara, zia Mara, ha quattro anni e zia Isa poco più di un anno. Sarà l’ultima estate di Mara che morirà nel gennaio 1933 per una scarlattina fulminante. Di lei anche abbiamo poche fotografie che abbiamo visto solo dopo la morte dei nonni e poi di nuovo dopo la morte di zia Isa. Tu, Tattà che hai portato tanto in braccio questa bimba, sei stato l’anello che ne ha permesso l’elaborazione del lutto e la persistenza della memoria. Le bambine sono vestite con cura, hanno le cuffiette per il sole, i calzini e le scarpette. Non tutti i bimbi avevano le scarpe a Napoli negli anni 1930. Mi dico che le hai probabilmente vestite tu queste bimbe, con tutta la tua cura e i tuoi canti di Giugliano in Campania, la città di Basile, granaio del regno di Napoli.