J’ai des photos de toi. Des vidéos. Des tirages agrandis. Tu es aux écrans, tu es autour. Chez toi aussi. Mais il y a une photo. Tu la montres souvent. Tu la sors de l’album comme si le flou venait du plastique protecteur et non du temps. Tu ris, caresses cette jeune femme que tu dis être toi. Tu passes ton doigt et l’évidence d’un baiser par ce simple toucher. Tu montres cette photo de toi du temps où les photos étaient rares. Approximatives et d’une étrange expressivité. Le trouble de toute identité, présence semblable et différente. C’est moi, j’ai dix-sept ans, je joue dans une pièce de théâtre. Tu dis. Tu serais la mère à qui l’on retire ses enfants, la folie immédiate de la mère. Ta bascule et le public témoin. Je vois un corps déployé en diagonale, semblable à un éventail ouvert. Le mouvement si exagéré qu’il semble s’animer sur le plat du papier au noir affadi. Mouvement de corps arrêté depuis ta jeunesse. Ce toi que je ne connais pas, qui ne me connais pas. Ce toi comédienne et c’est comme si la photo aussi jouait entre nos mains.
Touchée par la justesse des mots, cette jeune femme que tu dis être toi, une incertitude qui affleure. Merci
merci Isabelle, c’est beau de voir « l’incertitude », provoquée par les mots oui, merci