#anthologie #19 | l’inexplicable désir de classer

naissance
Les quatre yeux s’écarquillent alors qu’une main invisible fait pivoter le corps volcan
Un corps en boule comme démoulé, comme lapin tombé du chapeau 

télé
Les peaux suintent en chouinant dans la télé entre deux portes mal fermées

voyage
L’ombre d’un aigle rafraîchit les marcheurs sur une pente ocre du Mexique
La lumière jaune de l’aube sur les cavaliers galopant sur une colline, entre Iran et Turquie

rêve
Envols nocturnes au dessus des capitales entre chien et loup : la maison-loto, l’arbre à villes, l’arbre à foyers, la ville blanche
L’épicier d’un coup de hache coupe le bras du père tout près de la caisse

morts et mortes
Le corps enrobé de papier de soie, poudré comme un gâteau 
L’oncle ne respire plus dans le lit bleu où dit-on il a disparu
Le vieil homme osseux cesse d’exister dans un drap blanc

bêtise
Le regard du passant qui a reçu un crachat lève la tête et cherche la bouche 

éducation nationale
Les visages d’acteurs beiges scotchés sur la couverture du cahier de textes
Les caricatures des profs au stylo plume sur un coin déchiré d’une feuille de classeur
La frise chronologique aussi longue qu’un corps d’homme — guerre de cent ans

famille
La clef du père hésite à peine avant de pénétrer la serrure — le regard de la mère, assise toute petite au bout du canapé bleu
Les trois baisers rapprochés de la tante suivis des mêmes au même rythme de sa soeur et des mêmes au même rythme de la fille de sa soeur et des mêmes au même rythme de la fille de la fille de sa soeur qui n’aura pas de fille — est-ce une image?

A propos de Lisa DIEZ

Chercheuse polyvalente, sorte d'artiste tout-terrain. Valises posées depuis 5 ans dans les arts de la scène. Passages par la peinture, le documentaire, la photo… Et l’écriture, soutien fidèle de ces nombreuses traversées. Deux sites : www.soinartistique.fr (Collectif À la Source) et www.atelierdiez.com (vrac et chantiers).

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