rien ne distingue les souvenirs des autres moments
la rivière recouverte de lentilles à Ardillères, si denses qu’on croirait du sol en dur
les cèpes sur le sentier du bois, énormes, étourdissants de volume, si bien qu’on avait d’abord pensé qu’il s’agissait de souches d’arbres échouées à même le chemin
la rivière et la canne télescopique, jaune, du grand-père qui atteignait presque l’autre rive
les berges où l’on s’asseyait pour attendre la touche
l’odeur de l’appât X21 La Sirène dans le seau en plastique du père. Il fallait mouiller la farine pour former des boules de la grosseur d’un oeuf ou d’une orange et les jeter sur la zone de pêche. Passer la journée la tête dedans à respirer sa puissance d’attrait comme un poisson
les boites d’asticots blancs et rouges qui grouillent dans la sciure et qu’on tripote toute la journée
la vieille 205 beige garée plus loin, le coffre grand ouvert sur la glacière quand il faudra casser la croûte et écaler les oeufs
la vieille peau qui fait ses mots fléchés en attendant
les couvres-sièges en billes de bois qui laissent des marques rondes à l’arrière des cuisses
le moulinet qui chante sur un départ de sandre
les corps d’André et de Jean à l’unisson de la rivière, à l’ouverture de la truite
Hélène qui se fait bronzer au bord de l’eau
les levers de soleil dans la cabane de pêche du père Martin sur la Boutonne à Bel-Ébat
les gardons, les ablettes, les goujons, les carpes, les perches franches, les tanches, les anguilles, les brèmes qu’on mettait dans la cage de filet de pêche pliable en acier inoxydable
l’épuisette pour les brochets qu’on relâchait toujours. On pêchait surtout pour le plaisir de savoir lire une rivière
rentrer et chercher encore des cèpes au pied du chêne centenaire
J’aime cette concentration de souvenir autour de ces journées de nature et de pêche. On y est avec le narrateur, dans cette liberté. Merci Camille.
Chère Anna, un petit texte tout simple avec quelques souvenirs et un peu de fictions dedans pour essayer de faire le lien avec le reste des propositions. Mais j’avoue que cette consigne ne m’avait pas spécialement inspiré. J’ai laissé venir. Au final ça disparaîtra du projet de livre mais c’est important de faire des gammes (comme dit François). Merci pour ton retour. A très bientôt !