#anthologie #17 l Je n’irai pas manger chez vous

pas réussi à faire autre chose, je ne voyais pas comment m’y prendre et quand c’est venu, plus le temps, trop trop trop de boulot. tant pis.

Je n’irai pas manger chez vous. Je n’ouvrirai pas votre porte. Je ne saurai quoi vous dire. Je ne voudrais pas déranger. Je n’irai pas chercher sur Internet des images de votre intérieur. Je ne mènerai aucune enquête. Je resterai au pied de votre immeuble, à la sortie de la bouche de métro la plus proche ou à l’entrée du village où vous habitez. Je ne saurai jamais à quoi ressemble votre maison, votre bureau, votre chambre. De quelle couleur sont vos draps ? Parlez-vous parfois tout.e seul.e ? Je ne saurai de vous que vos livres. Ce n’est pas chez vous que j’aimerais entrer mais plutôt -si cela était possible- à l’intérieur de votre tête pour comprendre d’où ça vous vient ? comment ?  pourquoi ?  Et comment faites-vous avec 26 lettres pour attraper la complexité du monde ? Savez-vous que lorsque je vous lis c’est vous qui me rendez visite. Je vous ouvre la porte, vous entrez, vous connaissez le rouge de mon canapé, la tiédeur de ma chambre, le confort du fauteuil en bois installé sous le cerisier avec ses larges accoudoirs où poser une tasse de café.

A propos de Françoise Guillaumond

Ecrivain, directrice artistique de la compagnie La baleine-cargo sur Wikipedia, ou directement sur la baleine cargo.

9 commentaires à propos de “#anthologie #17 l Je n’irai pas manger chez vous”

  1. Oups je viens de réaliser, c’est corrigé. En fait je fais tout vite vite entre chargement déchargement de camion, représentations… Et come je ne veux rien lâcher, ça donne ça 🤪
    Merci du passage

  2. une belle façon de répondre à la consigne qui m’a posé les mêmes problèmes qu’à toi…
    et puis on trouve un moyen, on se glisse dans la fissure et on dit qu’on ne sait pas, qu’on n’ira pas chercher ce qu’il ou elle lisait, de quelle couleur était le canapé…
    c’est formidable… merci Françoise

  3. formidable, merci Françoise… ( me rappelle la lecture d’une biographie de Camille Claudel et d’étouffer sous les détails de draps, d’étreintes, de détail inventés de… « pris sur le vif »; je viens de lire Chambre avec vue sur l’éternité de Claire Malroux et là le sentiment d’entrer dans la chambre d’Emily Dickinson comme dans sa tête )

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