Ces photos perdues dans un crash de disque dur. Je ne les regardais pas. Je me souviens de chacune d’entre elles. Trente ans. C’est toujours ainsi, on archive ce que l’on a déjà archivé et peu importe in fine si l’archive disparaît. Ce qui compte, c’est le geste d’archiver.
Ses photos secrètes et ce qu’elles pourraient dire de lui. Ces photos dont il parle, il ne les montre jamais, des bribes de vie, paysages auxquels on n’aura jamais accès. Devant tant de silence, tant de pudeur, on les imagine toutes surexposées, perdues dans un éblouissement.
La photo que l’on croyait avoir prise. Elle était cadrée de telle façon. C’était un jour comme ci, comme ça… On pourrait vous la dessiner. On pourrait la nommer. DSCN_2044. Seulement voilà. Barbecue en famille, scène de crime, crêtes enneigées : elle n’existe pas. Elle n’a jamais existé. Elle n’a jamais été prise. A s’en souvenir avec tant d’obstination, n’est-ce pas la réalité de sa propre vie qui vole en éclat ?