#anthologie #18 | cinq plus que un

Photo Express : Trois magasins dans Lyon, on y porte les pellicules par deux ou trois pour éviter les trajets, les photos sont tirées en double exemplaire pour une modique différence de prix. Le papier n’est pas très épais, on choisit l’option avec marge blanche, format  9×13. On refait tirer en grand quelques-unes des plus réussies.

Clichés personnels : Toujours un écart entre ce que je crois cadrer et ce qui est cadré, comme un tour de passe-passe. Mauvais choix d’objectif ? On peut l’analyser comme ça, mais surtout une vision du monde jamais en adéquation avec son image. Rien dans ce morceau de papier ne dit le goût de l’air à regarder le lac.

Enfance : Elle a jeté les photos d’enfance qu’elle a pu récupérer, reste celle de la maison du Mont punaisée contre le montant de l’escalier, dans cette alcôve où on garde un piano droit qui ne sert plus. En noir et blanc, banale, deux enfants posent pour un adulte. Regarde l’objectif, arrête de tourner la tête.

Photo Travail : Nous photographions les enfants dessinant, jouant, grimpant, courant, dormant, pataugeant, penchés sur un jeu de construction, un puzzle, leurs chaussures, leurs manteaux, roulant à vélo, ramassant une balle, lançant un ballon, croquant un morceau de fruit, mélangeant des couleurs, trônant devant une peinture de lignes, de tâches, de formes rondes, d’aplats, découpant des magazines, collant des fragments de papier, des étiquettes, des images, des morceaux sur des morceaux. A tour de rôle nous apportons les pellicules chez PhotoExpress Guillotière, le moins cher des trois magasins de l’enseigne.

Photos Édifiantes : Nous fabriquons des panneaux thématiques: les ateliers de Gym, les bons comportements en récréation, les étapes de l’habillage, l’attribution des couchettes, les nouveautés du mois, la reconnaissance des livres, le lavage de main, le chemin vers la cantine, le rangement de la dînette, des poupées, des bacs de jeux, les comptines. Nous les éduquons d’image, la classe est le miroir sans tain de leur présence. 

Portrait : D’elle, je n’ai qu’un portrait. Demandez-moi l’heure et le jour, je vous les donnerai. Demandez-moi la négociation pour l’obtenir, je vous en parlerai. Demandez-moi si je peux le regarder, je me tairai.

A propos de Catherine Serre

CATHERINE SERRE – écrit depuis longtemps et n'importe où, des mots au son et à la vidéo, une langue rythmée et imprégnée du sonore, tentative de vivre dans ce monde désarticulé, elle publie régulièrement en revue papier et web, les lit et les remercie d'exister, réalise des poèmactions aussi souvent que nécessaire, des expoèmes alliant art visuel et mots, pour Fiestival Maelström, lance Entremet, chronique vidéo pour Faim ! festival de poésie en ligne. BLog : (en recreation - de retour en janvier ) Youtube : https://www.youtube.com/channel/UCZe5OM9jhVEKLYJd4cQqbxQ

6 commentaires à propos de “#anthologie #18 | cinq plus que un”

  1. oui, à la fois ce que je cherchais à débusquer, et évidemment la surprise que ce ne soit jamais ce que j’anticipais, mais un écart si favorable… rare qu’on ait le mot «édifiant» dans l’atelier !

    • Merci du passage,
      Édifiant, j’adore ce mot, presque une private joie du coup – et aussi (pour répondre à Emma C. du coup) la réhabilitation des participes présents offert par la traversée avec Beinstingel (coup de pied à mes idées reçues et totalitarisme du « pas d’adjectifs, pas de PP, pas d’adverbes en ment »)

  2. « Rien dans ce morceau de papier ne dit le goût de l’air à regarder le lac. » C’est juste ce que je reproche à mes « cartes postales » ! « Portrait », dernier fragment, me donne envie de lire une suite…

    • Merci Marlen, mais ne rien se reprocher, plutôt tenter et encore et encore, mélanger deux sens et deux lieux est une manière parmi mille,
      C

  3. Portrait : D’elle, je n’ai qu’un portrait. Demandez-moi l’heure et le jour, je vous les donnerai. Demandez-moi la négociation pour l’obtenir, je vous en parlerai. Demandez-moi si je peux le regarder, je me tairai.
    J’aime beaucoup ! Avec tout ce que ça ouvre dans l’imaginaire du lecteur…