Assise sur le bord de la chaise, les coudes posés sur le bureau qui les sépare et les doigts entrecroisés sous le menton, elle le regarde. Plusieurs fois, sans que rien d’elle ne bouge elle bourdonne mmm mmm et son bourdonnement se superpose à l’incessant flux de paroles. Passe inaperçu, elle s’en rend bien compte. Elle replie ses bras sur sa poitrine. Réajuste ses lunettes en haut de son nez. Avance à peine le buste, redresse le menton, rive son regard au front de l’homme, un front qui se plisse et se déplisse au rythme du mouvement des sourcils.
Il s’étonne de ce regard au-dessus de lui, comme si elle regardait une faille en train de s’élargir dans le mur auquel il tourne le dos. Il se passe une main dans les cheveux. Il voudrait qu’elle parle, ce silence n’est sans doute pas bon signe pour lui, obligé de débiter son CV comme une litanie.
Elle s’avance au-dessus du bureau, ouvre la bouche pour l’interrompre alors vous, ses lunettes glissent, elle les retient d’un geste brutal, les plaque sur son nez, alors vous, les lunettes glissent à nouveau, elle se retient de pousser un cri, sa gorge se contracte, son visage se rétracte.
Elle se lève. Je crois qu’on va en rester là.