« où êtes-vous encore allée chercher ça ? » C’est le chef qui me parle comme ça quand je lui rappelle un alinéa oublié d’un obscur règlement qu’il ne connaît pas, n’a pas l’intention d’appliquer et qui pourtant est toujours en vigueur. « Où êtes-vous encore allée chercher ça ? » vous l’impénitente fouineuse, l’empêcheuse de tourner en rond, l’emmerdeuse. Il se moque bien de l’interruption, il n’en fera rien, il n’appliquera pas, c’est lui le chef ! On ne débat pas avec un chef, il ne débat pas, c’est pas un salon ici, on n’est pas là pour causer, on est là pour agir. Le règlement on s’en tape, des règles il y en a trop, c’est de ça qu’on crève. Ah bas la paperasse !
« T’as trouvé ça où ? » me demande mon mari quand je lui rapporte une information qu’il n’avait pas lue malgré son addiction à la lecture des journaux sérieux. Le pouvoir et l’intimidation sont partout, même dans l’intime. Résister, être toujours en alerte. « T’as trouvé ça où ? » Ne pas être intimidée, ne pas se laisser faire, mais vérifier et débattre. Reconnaître parfois (souvent) qu’on avait pris pour argent comptant une vague rumeur diffusée à grand bruit sur les réseaux sociaux.
« C’est quoi tes sources ? » me questionne la chercheuse à qui j’évoque une étude qui m’est passée devant les yeux. Elle a raison, ce n’est pas un argument d’autorité, c’est la seule attitude critique à avoir vis-à-vis de l’information, de tout ce qui se dit, s’écrit, se montre. « C’est quoi tes sources ? » ne le prend pas mal, c’est juste qu’on ne peut pas dire n’importe quoi.
Ça, c’est le monde rêvé, le monde des salons, le monde où les pires banalités ne font rien d’autre que meubler le silence, celui où l’on a le droit de parler, d’argumenter, de s’informer librement, de poser et de reposer les mêmes questions et le devoir d’y répondre . »Pouvez-vous m’assurer que Mélenchon ne sera pas Premier ministre ? »
Mais quand la force remplace la parole, c’est autre chose.
« Ta gueule, connasse ! » Le débat est clos. »Ta gueule, connasse, ou je te frappe ».
« c’est quoi tes sources » et .. la chute de ce texte…écho à tant de situations bien réelles.. ah ce réel que F. B nous incite à aller chercher, il est là dans ce texte!
Merci Eve. On rentre dans un monde très inquiétant de désinformation et de haine décomplexée.
Très juste.
Et quelle vivacité dans ce texte.
Et « des règles il y en a trop, c’est de ça qu’on crève » – j’adore !
Et « débattre » – oui ! – « Reconnaître parfois (souvent) qu’on avait pris pour argent comptant une vague rumeur diffusée à grand bruit sur les réseaux sociaux » – oui, plus encore !
Et « Mais quand la force remplace la parole, c’est autre chose. » – parfois, oui, hélas !
Merci Annick.