Blanc, tout est blanc. Après les nuages, l’avion descend dans le blizzard. Un court instant, l’embâcle sur le fleuve. Il fait moins vingt-sept. Même pas froid. Le bel accent de celle qui m’accueille. Sur la vitre arrière de sa voiture, elle réclame l’application de la loi 101.
Rouge, tout est rouge. Saignées dans le vert. D’en haut, la terre n’est pas le sang des morts. Une carte postale de plages et de mer. Dans la ville, c’est en noirs ou blancs. Entre noirs manger chien et noirs manger goyave. Entre Kanaks et blancs victimes de l’Histoire. Entre caldoches historiques et métros attirés par la fiscalité et les salaires avantageux. Dans la nuit, dans la rue de la ville blanche, d’énormes cafards craquent sous mes pas. J’entends toujours les paroles de la directrice des programmes de la télévision publique, hurlant dans les couloirs : il faut les tuer ! Il faut les tuer ! Ce sont des sauvages !
Vert, tout est vert. Entre les deux bras des fleuves marrons. Dans le cœur de la ville, un bidonville. Toutes les misères là. Bâches trouées et tôles rouillées. Crack et SIDA courent dans la boue. Loin de la ville, les chants, les tambours, les danses, les gestes, les suicides, les paroles de six peuples autochtones que personne ne veut entendre. La très belle et séduisante créole détourne avec mépris son regard quand l’amérindien s’efface devant elle pour la laisser entrer dans le magasin.
Trois villes que les couleurs (naturelles, sociales) définissent terriblement, je dirai. Elles seront gravées dans ma mémoire, moi qui ne les connaît pas. Merci, Ugo !
Merci d’avoir évoqué Nouméa !
Tout en trois couleurs, l’immédiat, la sensation ( froid ou chaud) , les accents, la beauté et le broyé de cafard avec toujours cette vue politique ( car tout l’est ) qui embrasse plus large . Merci Ugo pour cette cartes du monde .
trois évocations et trois non carte-postales… la vie et la société qui entrent