Je suis arrivée à Fès un soir du mois de juillet au volant d’un vieux Ford Traffic, concentrée sur ma conduite dans une circulation intense. Il faisait presque nuit. J’ai laissé le camion près des remparts pour entrer par la Porte Bleue dans la médina et me laisser porter par la foule. Toute la ville est dehors, sur les terrasses, les places, se délecte de la lumière du soleil couchant. Fès est dorée, jaune, brillante, dégoulinante, sucrée, chaude. Fès a le goût du chabakia servi brûlant dans un papier et son miel dégouline sur les doigts.
Je serais allée à Tokyo en bateau. Arrivée à l’aube. Parmi les jonques sous les voiles, des paniers de fruits, des légumes, du riz et du soja. Arrivée en barque parmi les cargos dans le grand port sous les nuages, accostée devant les immeubles de trente étages. J’aurais confié ma barque au marchand ambulant d’azukis il repasserait plusieurs fois dans la journée et pourrait vérifier qu’elle reste amarrée là. J’aurais pris le métro station Kokusai-tenjijō. J’aurais pris un vélo taxi. J’aurais pris un pousse-pousse jusqu’au parc Kitanomaru pour recevoir la pluie sous les cerisiers en fleurs. J’aurais rendez-vous avec Yoko Tsuno.
J’aime les villes traversées par des fleuves, je trouve qu’elles respirent mieux que les autres. Escale à Llubiana puis vol jusqu’à Skopje, encerclée de montagnes basses, la ville étouffe sous la chaleur dans cette vallée. Macédoine. La banlieue en taxi depuis l’aéroport, l’autoroute, quadrillage vert, jaune, roux, beige, zones de constructions denses, la circulation est intense, vieux camions défoncés et polluants, voitures et mobylettes, on longe des vergers, des champs cultivés, des constructions hétéroclites, beaucoup de déchets divers sur les bas-côtés. Arrivée dans le centre par le boulevard Alexandre le Grand, les immeubles en pierre blanches, les avenues larges, le grand centre commercial. Traverser le Pont de pierre, de l’autre côté la vieille ville ottomane, les cafés, le bazar, les caravansérails. La ville respire par le Vardar.