Il a cinquante quatre ans il est auprès de Mountbatten à Kandy, à la tête d’un maigre corps expéditionnaire français, il crée une petite force qui agit avec les britanniques dans la jungle derrière les forces japonaises, il déplore le laconisme des notes du cahier qu’il retranscrit et cède à la tentation d’annexes tirées d’une petite liasse de courriers personnels qui ne figurent pas dans le document dactylographié principal et ne sont pas destinées à rejoindre les archives, il a vingt-six ans et il est dans l’horreur du Chemin des Dames, il a vingt-huit ans et il arrive avec sa jeune femme de dix-neuf ans à la légation à Pékin, elle lui annonce qu’elle est enceinte, il a quarante-cinq ans et il est chef d’Etat-major en Indochine sa femme lui apprend que leur tout-jeune fille aînée est fiancée à un de ses officiers, cela ne dure heureusement pas, il a trente ans et il est attaché militaire à l’Ambassade du Chili, il est silencieusement heureux de l’arrivée d’un nouvel ambassadeur, il a trente neuf ans et avec son bataillon composé de troupes coloniales et de jeunes recrues des Pyrénées Atlantiques il couvre l’arrière garde des troupes françaises, tentant de défendre les ponts au milieu de la débâcle, se heurtant aux villes qui se veulent villes ouvertes, il s’étonne de la fermeté de l’écriture, il pense que le cahier a été écrit pendant la période suivante, il a quarante quatre ans, il est à côté d’Alger, il constitue une division motorisée dans l’ambiance des tractations entre américains et forces françaises libres, il a cinquante-sept ans, il commande en Indochine et tente de modifier la tactique, dans les mois qui précèdent l’indépendance il doit désarmer ses harkis le soir pour leur éviter de tenter de rejoindre les maquis avec elles, avec ses camarades il cherche comment les préserver de ce qui les attend, il a cinquante huit ans et il accueille son successeur, il a soixante et un ans, il est à la tête des anciens combattants et aux prises avec une des maréchales, il a quatre vingt dix ans il observe les règles d’un tiers-ordre franciscain, il meurt.
PS la troisième personne celle qui jeté des coups d’oeil par dessus l’épaule du deuxième ne garantit pas totalement l’exactitude des dates et de certains éléments reconstitués de mémoire, observe en outre que ceci n’est un très lacunaire regard sur une longue vie.
quel humour du moins c’est ainsi que je le ressens Merci Brigitte
merci parce qu’en ce cas c’est ce que désirais un peu
je l’aurais bien vu à Madagascar fin des années quarante ce garçon… (trop bien)
il avait des Malgaches avec lui je crois en France dans les derniers jours de guerre (au reste respectueux ou mieux, si on admet qu’il était normal que des Malgaches soient amenés à faire ces combats)