Lorsque je suis rentrée du travail, le chien pleurait derrière la porte du voisin. Je me réfugiais dans la cuisine. Les plaintes continuaient, chacune se terminant par un insupportable son suraigu. Je fermais les yeux et plaquais les mains sur mes oreilles. Au moment où le chien se taisait, mon estomac se contractait comme si ce spasme pouvait éjecter de moi l’angoisse de la plainte à venir.
Pour tenter de me reprendre, je jetais dans la machine à laver ma veste et les deux torchons accrochés au-dessus de l’évier et lançais un programme couleur. Attirée par le brassement régulier du linge dans le tambour, je me suis assise devant le hublot. Je regardais les bulles de mousse se précipiter sur la vitre, être balayées par la manche d’un vêtement, se former à nouveau, s’agglutiner les unes aux autres, être submergées d’une vague, lutter jusqu’au rinçage.
J’accompagnais le bruit sourd du tambour d’un chant grave que je laissais vibrer dans tout mon corps, descendre, j’avais le sentiment que si j’arrivais à le mener jusqu’à la terre je parviendrais à contrebalancer les accents suraigus du chien.
C’est alors qu’une matière a émergé entre les joints du carrelage de la cuisine. De fines particules s’élevaient. La matière a pris forme, blanche et ronde comme un personnage de Barbapapa, le dessin animé que regardaient mes enfants, quand ils étaient petits. Un fantôme de Barbapapa ! Il avait de grands cils doux et a ouvert les bras comme pour me consoler. J’ai poussé un hurlement. Le chien s’est tu.
3 commentaires à propos de “#anthologie #08 | Tambour battant”
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Très intéressant cette alternance sonore, et cd « faire plus de bruit » pour attenuer les plaintes du chien.
faire des plaintes d’un chien un vrai cauchemar sonore, saisissant !
la machine à laver l’angoisse … mérite un brevet !