#anthologie #08 | Dans la chambre un soir

Je m’allonge quelques instants dans ma chambre sur mon lit. Je retrouve un rythme cardiaque stable, je détends tout mon corps, mon esprit va et vient, je tire le rideau sur ma journée, mes yeux sont mi-clos. C’est alors que je me rends compte de la présence d’une porte juste à côté de la cheminée que je n’avais pas remarqué jusqu’à présent. Une porte pas facile à voir, se confondant avec le blanc du mur mais ce soir, j’en vois les contours ainsi qu’une poignée discrète. Mon cœur fait un bond, ça m’étonne quand même, dire que je vis ici depuis 6 ans et que je n’ai jamais remarqué cette porte !

Je respire, je retrouve mon calme. Je me dis que grâce à cette porte je pourrais maintenant rejoindre la cuisine directement sans passer par le couloir. Et voilà que la porte s’ouvre, d’un coup, violemment, si brusquement que la fenêtre trésaille et claque. Un homme équipé d’un parachute qu’il tient devant lui, casqué, masqué, avec des chaussures montantes à lacet, en treillis militaire kaki et une veste tendance noire me demande sans surprise et d’une voix autoritaire :

Lui : C’est ici la mission ?

Moi : Quelle mission ?

Lui : La mission du jour, celle pour laquelle ceux de là-haut m’envoient !

Moi : Je n’en sais rien, on ne m’a pas informée. Mais comment êtes-vous entré ?

Lui : J’ai sauté de l’avion et je me suis laissé porter par le vent en actionnant mon parachute jusqu’en haut de votre immeuble. Sur la feuille de route c’était clair, une fois posé, je descendais par l’escalier puis j’arrivais chez vous en empruntant le passage secret derrière la cage d’escalier.

Moi : Il y a une porte aussi ?

Lui : Oui, mais elle est cachée, personne ne peut la voir.

Le parachutiste reste debout en me parlant, moi toujours allongée, à peine me suis-je redressée sur mes avant-bras pour lui répondre. Ses bras semblent très encombrés par son parachute qui frôle le lit, la chambre est étroite.

Moi : Voulez-vous qu’on aille dans le salon c’est plus grand pour replier tous ces tissus ?

Lui : Non je n’ai pas reçu cet ordre.

Moi : Alors je…mais je n’ai pas le temps de poursuivre ma phrase, voilà qu’il jette son parachute sur moi comme une toile et que de ni une ni deux il tente de m’étouffer avec. S’en suit une lutte acrobatique revigorante, et d’un coup, il se redresse en chassant d’un geste sec le tissu qui lui recouvre la tête et dit :

Lui : J’arrête, c’est fini, la mission est terminée

Moi : Déjà ? Vous partez déjà ?

Sans me répondre, l’air fermé derrière son masque, il se lève, replie à la diable son parachute, ouvre la porte du mur et sans un regard vers moi, disparaît en la claquant. Je me recoiffe, me mets debout, m’étire doucement en baillant et vais dans la cuisine en passant par le couloir.

A propos de Virginie Hanet

Devenue professeur documentaliste dans l'enseignement privé sur le tard, mais avant éducatrice, photographe, peintre, libraire, bibliothécaire...Reprise des études en 2020 avec le D.U. d'animation d'ateliers d'écriture à l'université d'Aix Marseille, puis en 2022 une courte formation avec Régine Detambel dont la démarche de bibliothérapie créative m'intéresse. Un manuscrit en passe d'être édité... heureuse de rejoindre le Tiers Livre pour de nouvelles explorations littéraires.

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