j’ai vu les feuilles du lierre s’agiter étrangement sur ma droite. La bibliothèque qui logeait son pot n’y était pour rien. Pour imiter la plante, les pages du livre que je tenais ont rempli leurs voiles d’une brise qui aurait dû venir de la fenêtre mais que j’avais fermé plus tôt à cause du froid. J’ai pris le vieux ventilateur à part pour qu’il se dénonce. Comme il ne disait rien, j’ai scruté chaque parcelle de murs et des plinthes pour trouver le coupable, une main sur le parquet pour écouter l’air. Plus une brise mais un vent froid et brusque. Il venait d’une porte qui donnait sur la chambre voisine où vivait une fille dont l’histoire n’a plus aucune importance puisque la porte en elle-même manquait au mur. Un trou béant prenait sa place et donnait sur un ciel qui avait peu de rapport avec la nuit tombée derrière moi. J’ai vu une paire d’oiseaux traverser ce cadre sans faire attention à moi. Je me suis glissé au bout du lit pour me lever, fait quelque pas, pour mieux voir ce que je voyais déjà. Une bourrasque, puissante, m’a fait comprendre ce que je risquais. Le vent était de ceux qui frappent les côtes et fatiguent les falaises. Et des falaises, tout le monde le sait, des falaises tombent à coup sûrs les imprudents que le vide réussit à attraper. J’ai enfilé un pull et je suis retourné au lit avec l’espoir de retrouver ma page.
J’aime cette suite d’images et d’actions, et l’imaginaire qui s’en dégage. J’aime beaucoup l’atmosphère qui s’en échappe. Merci.
dans le secret des pages – le vent…