Tout est calme dans la maison, la journée s’achève, partagée entre menus travaux, promenade avec la chienne, sieste au jardin, vélo d’appartement, moments d’échanges autour des repas, jeu intellectuel parfois, et temps incompressible de lecture. Pour compléter ce jour d’été, si long, si lumineux, il ne me reste plus qu’à m’asseoir devant ma table ronde, à ouvrir l’ordinateur pour entrer de front dans l’écriture, le coucher du soleil, qui éclaire le pan ouest de la maison, projetant ce soir son flamboiement, ne viendra pas me distraire, je n’en aperçois que la projection orange sur le mur blanc du palier.
Tout le jour j’ai ruminé mon sujet du soir, pioché dans le carnet, recueil des pensées du matin, dont les formules brèves ne sont généralement que des portes entrebaillées sur un thème à creuser, qui va émerger petit à petit, souvent décanté pendant ma promenade matinale. Vient le moment de silence quand Lulu se repose, quand les travaux agricoles ne font plus ronronner les tracteurs, quand tombe une fraîcheur chargée d’odeurs herbacées. Il semble se suffire à lui-même, rejetant presque l’idée que, de surcroît, il aurait besoin d’une sorte de consécration, d’épiphanie par l’écriture. Je pense aux injonctions venues d’ailleurs à « vivre le moment présent » ; il y a longtemps que je le vis dans l’acte d’écrire, longtemps que j’ai fait mon choix.
Déjà le mur du palier, « le petit pan de mur… » devenu rose pâle, tourne au mauve, au violacé. Tirer les rideaux. Je ne veux pas attirer les insectes, bourdons, frelons ou moustiques quasi invisibles. L’ombre s’étend, traversée par les flèches erratiques des chauves-souris aux radars infaillibles. Un court moment, la couleur verte teinte la baie vitrée, jusqu’à la pâleur étoilée qui subsistera « sotto notte » jusqu’au matin, ne laissant deviner que la douceur du tissu de coton suspendu.
Le clavier du Mc Intosh s’est éclairé de lui-même, la lampe de bureau va prendre le relais, j’ouvre une page vierge dans mon traitement de texte.
Bravo pour ce texte qui fait durer l’instant ! « une sorte de consécration, d’épiphanie par l’écriture », oui c’est exactement cela.
Parfois, l’instant dure tant qu’il faut une énergie nouvelle pour se lancer…
Merci pour votre lecture JMG