Le noir de la nuit n’est déjà plus si noir. D’ailleurs, le noir de la nuit n’est jamais vraiment noir, pas intégralement, reste toujours un peu de clair, un peu de jour, de lumière. Pas assez pour bien voir les couleurs en couleurs, mais voir au moins les formes, de quoi se déplacer sans cogner, sans tomber, sans buter dans les choses. Le matin, par la fenêtre de l’est, le soleil se lève, il pose de grandes feuilles blanches aux découpes rectilignes sur le bois du plancher et sur le bois des murs, il efface le noir de la nuit jusqu’à ce qu’il n’y ait plus du tout de noir, jusqu’à ce que les formes prennent couleur, se transforment en objets, en objets familiers. Lit, chaise, table, étagère avec livres, vêtements sur la chaise, lampe. Et la lumière de l’écran qui fait ressortir le noir des petits signes noirs qui racontent des histoires, cette lumière de l’écran qui est si absorbante qu’elle avale les montagnes, les arbres et les nuages de la fenêtre du sud. Maintenant qu’il fait jour tu ne vois rien d’autre qu’elle, la lumière de l’écran qui ne laisse dans le sombre que les lettres qui font mots