#anthologie #04 | Où tu Habites ?

habiter cette maison qu’on a trouvé si laide au début et quarante ans après, l’aimer chargée de toute une vie.
Cette grand’mère dans la salle d’attente du médecin, J’habite une petite maison entre deux villes on n’est que des mamies, et on est bien, on s’aide, on parle.
Habiter vingt ans dans un appartement sans soleil, sans avoir parler à un seul des autres locataires, ce n’est pas habiter, c’est loger. Sans avoir de chambre à soi puisqu’il n’y avait pas de chambre, il n’y avait que des lits changeant de place ce n’est pas non plus habiter c’est vivoter.
Essayer une maison avec une annexe, c’est sûrement entasser des années le «barda» tout ce qui ne sert à rien, tout ce qu’on veut garder au cas où, les dessins des enfants, le vélo qui ne sert plus à personne, les pots de fleur, des valises, des papiers cadeaux, de vieilles chaises.
Il avait un grand-père paternel qui habitait une maison avec jardin en ville. très sourd, toujours à son bureau avec sa pipe, dans les années cinquante, son seul souvenir, il lui donnait quelques sous pour lui acheter un petit cube de tabac gris. Son Pépé maternel, veuf habitait un tout petit appartement avec sa fille, veuve avec trois filles, et au même âge travaillait encore dans l’atelier d’un marchand de vélos.
J’ai visité voilà trois ans, la ferme où on allait en vacances chaque année dans les années 1980, là où on avait dormi dans la paille d’un ballot à même le sol, en face d’un feu de cheminée dans une grande pièce vide, ce n’était plus une ferme, elle avait été rachetée par un couple qui l’avait transformée en une très belle demeure luxueuse et nous avait laissé entrer, nous donnant accès à toutes les pièces qu’on avait vu pleines d’une grande famille très accueillante mais très démunie.
Ils ont habités seize ans dans la maison où ils ont eu cinq enfants, c’était vraiment habiter dans le sens d’une âme habitant son corps, ils s’en foutaient de ne pas avoir assez d’argent, pas de meubles plutôt des caisses empilées où tous ils vivaient intensément.
J’ai habité une année scolaire une pièce, non pas une pièce, un coin dans une grande pièce, institutrice dans un internat, toutes les nuits je voyais la lune par une fenêtre sans rideaux, je n’ai même pas pensé que j’y habitais, je pensais à bien enseigner, et aussi à quelque chose comme sauver le monde.
Je n’ai jamais vidé une maison, même pas celle de mes parents, je n’avais pas envie de dire ce que j’aurais voulu emporter, peur de léser mes frères et soeurs, et je les ai laissés faire. Aujourd’hui en en parlant, je trouve mon attitude pas sympathique du tout.
Ma voisine a habité dans un appartement d’un immeuble qui avait deux entrées, une sur la rue du onze Novembre, l’autre sur la rue du General Leclerc qui s’appelait avant rue Voltaire. Elle a déménagé dans la continuation de la rue qui garde encore son nom de rue Voltaire parce qu’elle préférait un écrivain à un général.