#anthologie #04 | J’habite loin de moi

j’habite loin de moi comme l’oiseau loin du nid. J’y retourne parfois passant de longues minutes à m’entretenir avec la lune. D’autres fois, je préfère habiter le vent pour accompagner la mer dans son éternel ressac.

Petite fille, j’ai dû quitter ma maison, en y retournant adulte, je n’ai rien reconnu si ce n’est le sol, mes pieds sont allés directement sur le carrelage de la salle à manger où un carreau descellé me servait de balançoire.

Habiter au dernier étage, vue sur les toits, suivre la courbe du soleil, comprendre les nuages et parfois deviner une silhouette, un visage.

Chambre de bonne en famille, les parents et deux enfants… très vite à force de promiscuité, la violence.

J’ai aimé habiter le ventre d’une ville. J’y ai senti mon cœur battre au rythme d’un corps insatiable qui avale tous ceux qu’il peut. La ville s’écrit dans les rues, les sous-sols,  les toits, les interstices peuplés d’inconnus en errance.

Surtout ne pas être propriétaire, ne pas se sentir enfermé par les crédits, enfermé par la possession. Possession des lieux, possession de l’un sur l’autre.

Je n’ai jamais habiter à la campagne, la maison isolée m’angoisse, l’absence, ou la quasi-absence, d’êtres humains creuse un vide incommensurable que je ne saurais combler.

Rêve d’ailleurs, quitter la capitale pour une autre capitale de province, trouver “l’appart” après une année de recherches, l’aménager à son goût et puis mourir. 

J’ai habité pendant une année une chambre minuscule perchée à Séville dans laquelle il faisait plus froid que dehors.

Dans les livres à lire, je garde un œil attendri pour celui de Vinciane Despret Habiter en oiseau.  Et mon esprit voyage loin d’une maison.

2 commentaires à propos de “#anthologie #04 | J’habite loin de moi”

  1. « Habiter en oiseau », un livre magnifique !
    « j’habite loin de moi comme l’oiseau loin du nid » : cette image parle. (deux autres plus évidentes). Plaisir à lire tes/vos fragments. Merci Michèle.