Habiter pour la première fois une maison avec un jardin.
Habiter pour la première fois un jardin en réalité.
Habiter pour la première fois un arbre plus que la maison elle-même, bien que jamais grimpé sur cet arbre. Y poser une cabane, y avoir déjà pensé. Rassembler des planches qui ne servent plus à rien en se disant qu’elles seraient bien là, en cabane, dans l’arbre, pour habiter la cime.
Habiter le jardin et s’apercevoir que je n’habite rien, en réalité. Que les spontanées l’occupent mieux que la table et les trois chaises.
Trouver la manière d’habiter sous le vieux prunier parce que le soleil s’y couche.
Habiter la lumière du soleil à une heure matinale, entrer par la porte ouverte, traverser les vitres des fenêtres.
Habiter dans l’étroite ligne d’un trait de pluie, s’étaler sur le seuil.
Avant de venir ici, j’ai habité une maison au toit rouge à l’aquarelle, dans un cadre, sous verre.
Habiter une fraise en la croquant et s’apercevoir que de ne pas avoir de fraise dans le potager c’est peut-être ne pas avoir réussi à habiter.
L’art d’habiter un lieu que l’on habiterais comme on le ferait chez quelqu’un d’autre. Regarder par les fenêtres et avoir la sensation d’être invité. Être son hôte. S’accueillir. S’habiter.