L’absence de mobilier dans ces maisons de brique ouvertes sur des jardins les surprend d’abord. Le calme et la fraîcheur qui y règnent ont vite fait de les conquérir. Dans les palais, l’émerveillement les gagne devant l’élégance et l’ingéniosité de cette architecture étrangère. Kléber arrive de Guizeh où il occupe provisoirement le palais de Mourad Bey, le mamelouk devenu son hôte et ami. C’est de jardin qu’il discute avec son architecte Protain à l’ombre de la galerie aux fines colonnades et aux arcs charmants dans son palais du Caire, endommagé par les émeutes. En ce 14 juin 1800, il imagine. Des rangées de palmiers dattiers et de palmiers doums. De percéa indica et d’acacia. Des oliviers, des pêchers, des figuiers, des jujubiers, des grenadiers et des tamaris. Agréablement étagés tout autour de bassins où fleuriront lotus et papyrus. Une enfilade de bassins s’alimentant les uns les autres en produisant un murmure rafraîchissant. De la vigne aussi grimpant aux colonnades pour créer cette ombre délicatement parfumée par les roses et les jasmins qu’il apprécie tant quand elle traverse les moucharabiehs de sa chambre et les voilages qui protègent sa couche. Kléber n’aime rien tant que ces fines toiles agitées par le moindre souffle, suprême image de la sérénité. Kléber rêve en corrigeant les croquis de Protain. Il est architecte lui aussi et ne manque pas d’idées pour la ville future. Tout est en ordre. Qu’elle est belle la nouvelle colonie ! Que la paix est douce après la conquête ! Qu’il est bon de préparer l’avenir !
Que fait ce petit homme, humble et misérable, vêtu de la chemise bleue des chameliers à qui Kléber tend la main ? Suleyman va lui planter un poignard dans le cœur et le frapper encore trois fois à terre avant de s’enfuir. Protain qui s’est interposé et a été blessé indique la direction de la fuite du meurtrier qu’on retrouve caché « sous le feuillage d’un nopal touffu ».
fait penser à cet imbroglio juridique actuel pour empêcher la restitution à l’Algérie des reliques coloniales stockées à Chantilly…
La campagne d’Egypte comme préfiguration de la conquète de l’Algérie trente ans après; certains soldats ont fait les deux !