#anthologie #03 | la chose dans la vitrine

J’ai le nez comme collé à la vitrine, j’en louche presque. Il y a cette chose dans la vitrine qui me fait de l’œil depuis tout à l’heure. Je l’aime de loin, cette chose dans la vitrine, je la désire sans savoir si elle me plairait vraiment. J’éprouve pourtant un désir fort pour cette chose dans la vitrine. Cette chose pleine de sucre et de gras. Je l’imagine poisseuse et collante si je l’avais dans la main, sans aucun emballage ni carton de service, cette chose qui se trouve dans la vitrine me laisserait des traces de sucre et de gras, c’est sûr, me laisserait des mains toutes sales, grasses et collantes qu’il faudrait que je léche pour éliminer tout surplus de gras et de sucre. J’aimerais bien les lécher c’est sûr mais je risquerais de m’en mettre sur le bout du nez et ça, ce serait désagréable. La chose dans la vitrine, la chose grasse et sucrée, je l’imagine dans ma bouche, je me vois tendre mes lèvres et ma langue vers elle, je me vois mordre dedans. Cette chose dans la vitrine a l’air tellement délicieuse, sans doute pas bonne pour la santé, pas bonne pour qui a du diabète ou trop de cholestérol mais ce n’est pas mon cas. Cette chose trop grasse et trop sucrée à vue d’œil se collera aussitôt sur mes hanches et mon ventre, c’est sûr ça fera une bouée autour de moi cette chose difficile à porter mais qui a l’air tellement bonne. Elle me fait vraiment envie, je pense que j’aurais du plaisir peut-être même un instant extatique peut-être un orgasme qui sait, de cette chose si grasse et si sucrée. Mais si elle était vraiment trop grasse et trop sucrée, si j’en avais trop sur les papilles à les saturer, alors cette chose qui me semble irrésistible dans la vitrine, alors peut-être qu’elle ne serait pas si bonne que ça, peut-être que je ne pourrai pas la terminer, que j’en éprouverais une sensation de dégoût, un rejet, et une grande déception. Ce serait dommage, vraiment, de succomber à cette chose dans la vitrine et d’en être déçue au bout du compte, non ?

A propos de Perle Vallens

Au cœur d’une Provence d’adoption, Perle Vallens écrit et photographie. Ecrire c’est explorer l’intime et le monde, porter sa voix pour toucher. Publie récits, nouvelles et poésie en revues littéraires et ouvrages collectifs. Lauréate du Prix de la Nouvelle Erotique 2021 (au diable vauvert) et autrice d'un livre de photographie sur l'enfance, Que jeunesse se passe (éd J.Flament), d'un recueil de prose poétique, ceux qui m'aiment (Tarmac), d'un recueil de nouvelles, Faims (Christophe Chomant) et d'un récit poétique et choral, peggy m. aux éditions la place. Touche à tout, pratique encore le caviardage, le cut up (image et/ou son), met en voix (sur soundcloud Perle Vallens ou podcasts poétiques), crée des vidéo-poèmes et montages photo-vidéo (chaîne youtube Perle Vallens)...