pousser la porte de fer et de verre à deux fois, du poignée et de la fesse, passer devant la statue offrant ses mains aux arrivants. Salle de prière ? Funérarium ? Se rappeler de passants entrer en se signant, apportant une offrande. Pourtant des flyers dans un présentoir proposant des contrats d’assurance pour la vie, pour la protection contre les voisins, pour le travail, pour la vie du famille, les fuites, les fissures, les bris de glace, les chutes, la grêle, les accidents, enlevant l’équivoque. De même les fauteuils à bulle en plastique avec des accoudoirs devant la table pour patienter en lisant les lettres du groupe avec les bénéfices de l’année. Le jet d’eau en panne avec ses galets blancs. Le carré de plantes d’intérieur dans leur lit de billes de brique. Se pencher pour vérifier leur authenticité, apercevoir de la poussière sur le vernis, y laisser sa trace avec le doigt. S’entendre marcher sur le carrelage en marbre amplifiant le son des pas, le claquement des semelles. Le hall au raz du sol. Traversée des pantalons à pli, des chaussures à picots, des tailleurs, des aiguilles à talons. Saluer Corine la standardiste. La Paix protection juridique et fiscale, Bonjour, ne quittez pas. Appuyer sur le bouton d’un des deux ascenseurs, regarder sans voir le clignotant des triangles équilatéraux au fronton. S’engouffrer dans la porte pour différer le retour de week-end de la collègue encore au loin dans le rétroviseur de l’ascenseur. Neutralité des regards des personnes surélevées. Surprendre le coup d’œil vérifiant la mise dans la glace, ajustant la coiffure du revers de la main, lèvre en avant. Regarder dans le vide tout en notant les dossiers sous le bras, les attachés case, la mise de chacun. Confirmer l’étage. Noter la distribution de chacun dans la ruche. Cinquième. Remonter silencieusement la moquette du couloir. Longer les parois de verre avec les boxes de chacun. Les accessoires pour se sentir chez soi devant l’ordinateur. Photos. Dessins d’enfants. Carte postale, dessins humoristiques, la plante reflet de l’enfermement. Au coin du couloir la fontaine à eau et la cafetière crachotant son jus. Saluer les matinaux discutant, la mug à la main. Bonjour tout le monde, Salut toute seule. Lundi matin. Les piques de la belle mère. Le déjeuner du dimanche. Les déboires du week-end. Arriver devant son bureau avec la pile des dossiers en cours du vendredi, les nouveaux. S’asseoir sur sa chaise et rouler jusqu’à son tiroir. En constater le désordre. Remettre le rangement à plus tard. Allumer l’ordinateur. Évaluer rapidement la teneur des mails, leur urgence. Regarder la liste des appels. Au loin de l’autre côté de la rue, la femme penchée qui refait le lit des enfants, tapant sur les oreillers, lissant nerveusement le dessus de lit, disparaissant pour revenir de moitié dans ce qui doit être la cuisine, ouvrant un peu sa fenêtre pour fumer, ne sachant pas qu’ici nommée la bourge. Enlever le post it ne pas oublier avec urgent et un numéro. Taper l’indicatif permettant de passer les appels à l’extérieur, à ne pas confondre avec l’autre indicatif pour les communications personnelles comptabilisées. Ne pas oublier de consigner les appels, les courriers sur le dossier pour remplir les procédures. Passer plus de temps à se justifier que travailler le fond du dossier. Sur la porte, une affiche, lauréat de l’année, titulaire de la norme Iso 9002. Commencer par le neuf. Balayer du regard les éléments. Apprécier la teneur du litige. Vérifier les garanties. Demander des pièces en complément. Rédiger une lettre d’injonction sans se poser trop de question, étouffer ses doutes sur le bien fondé de la réclamation, se mettre entre parenthèse pour se débarrasser de la pile des dossiers du jour. Sortir son dictaphone mais ne pas aimer parler à voie haute. Ranger son dictaphone pour préférer taper le courrier, écrire en voyant plutôt qu’écrire en dictant. Passage de la tête de Lydie entre les vitres, pour rappeler le pot de retraite d’ Evelyne demain avec la carte à signer et l’enveloppe pour le vélo .
c’est fort, quand on se prend pleine tête ainsi la normalité ordinaire…
Je suis comme un escargot que l’on a fait jeuné, avec la double contrainte de l’infinitif et des adjectifs, j’ai trouvé du ressort ailleurs. .