Alors la ville. Alors la ville là. Non pas sous mes yeux comme un paysage ni vraiment sous moi qui me tiens debout sur l’esplanade claire, seule tout à coup, mon gobelet de carton à la main. Il y a longtemps ici des bousculades, des valises sans roues, des mots lancés dans toutes les langues du monde. On a changé les abords de la gare, on en a relégué les voix. Le sol plus clair, plus soigné, comme d’un salon, écarte sans doute les corps, les invite à s’asseoir sur les bancs de pierre ou à s’approcher de la balustrade. Je vais jusqu’au groupe du lion à l’enfant. La bête tourne son mufle vers l’Est et le petit adossé à son flanc, les bras écartés, fixe un autre horizon. Un homme, sans les voir, l’avant du corps posé sur la bordure, les mains ouvertes en coquille autour de son téléphone, scrute l’écran. La ville est sous un ciel gris pâle, la ligne de collines tout au fond se laisse deviner entre deux antennes. Puis les toits. Un cahot qui va en s’éclaircissant. Demain commencera la marche. Il ne me déplaît pas d’attendre, de rester un peu en suspens, de jouer à ne rien peser, à n’être qu’un de ces voyageurs distants qui mangent ou écrivent, fermés à ce qui monte jusqu’à nous.
Les temps se bousculent comme une foule et l’espace se transforme sous nos yeux, c’est une ville et toutes les villes, cette gare, même si c’est une autre, j’y suis allée aussi. C’est très réussi.
Je réagis très en retard ,désolée. Je rencontre cette superposition des temps et des lieux depuis le début du cycle. Je la ressens en partie comme un obstacle à l’élaboration des deux textes proposés par François tout en espérant qu’il s’agisse aussi d’autre chose. Merci beaucoup ,donc pour cette lecture.