Découvrir de nouvelles choses (les) maintient en vie
je suis allé voir dans l’encyclopédie offerte par D. lors de son déménagement, ou plutôt celui de B. sa mère (j’aime assez ce prénom) (mais elle je ne l’ai jamais vue qu’en photo – ou alors non, en vrai au vernissage d’une de ses expositions) ce qu’ils disent (ou elles d’ailleurs pourquoi ce tropisme?) de cette petite ville centre d’une espèce de civilisation (c’est un peu trop) un empire ? (aussi) deux ou trois siècles avant notre (notre) ère – en vrai sept ou huit (siècles) – plein de trucs improbables du style sacrifice des enfants, ports circulaire et rectangulaire, et d’autres encore (des dessins que je reproduis – civilisation mercantile et surtout commerçante, Palerme, Agrigente, Carthagène et Alicante- Scipion, l’incendie de 142 avant le truc et le bazar suivant puis Hadrien (et ses mémoires révélés par Margot) (mais pas un mot sur Louis neuf (dit Saint) qui y mourut, lequel rendait la justice sous un chêne dit la légende) (note de bas de page : Larousse illustré en dix volumes, (plus un supplément – en date de Août 1968), 1960, Imprimerie Larousse 1 à 9 rue d’Arcueil, Montrouge (Seine) – Août 1960 (vois-tu comme le monde est fait) tome 2 de BAUF à CHER) – non mais nous maintenir en vie, certes, mais respirer souffler – avancer regarder
Il essaye d’oublier son cauchemar
C’est un hasard – il s’agit de conduire un camion remorque dans des rues étroites – transpiration – désespoir réveil – ce sera tout (on ne va pas aller loin avec ça)
Ils apparaissent dans les endroits les plus inattendus – Patienter sur la jetée
à ce moment-là, le poste qu’il occupera sera de gratte-papier, bas de l’échelle, puis il grimpera pour finir numéro deux France – une dizaine d’années – il y avait les disques de la méthode où son tailleur était riche, et sa mère n’était pas un garçon (sic) (citation de mémoire), son accent français, son rire et ses cris de douleur, la neige et ses Gitane, sa montre et son petit poisson – plus tard dans les deux lustres qui suivront, toujours dans cette même maison, pour le moment, ce soir-là de juillet, il les attend, ils arrivent (elles aussi bien) (ils c’est sa famille, deux filles et deux garçons et sa femme) il doit être assez tard mais je ne me souviens pas avoir mangé quoi que ce soit peut-être dans l’avion Nice Paris – sans doute la promenade eut-elle lieu plus tard, passage chez sa mère qui vivait et a toujours (en France) vécu boulevard Jourdan cinquième étage ascenseur ceux à claire-voie, cabine à mi hauteur en verre, porte en fer forgé noir, comme d’hier, la cuisine qui donne sur l’entrée, à gauche, des verres dépolis à mi-hauteur aussi, à droite salon-salle à manger, sur la cheminée la panthère noire offerte à son bâtonnier de mari avant guerre – un meuble entier en poste de radio tourne-disques – on y a dormi une nuit ou deux avant de rejoindre l’hôtel de l’Univers qui donnait sur une place (qui existe toujours – il semble qu’alors j’aie été victime de quelques mésaventures urinaires, j’ai oublié nettement) – là, avec sa clope, sur la jetée les avions qui se posent – sans doute y en avait-il nettement moins qu’au moment où je vins chercher les miens (le vol de mes papiers dans le métro la veille du départ m’avait empêché de partir et je les accueillais, qui revenaient de Ierapetra) dans ces journées-là, par là, lui avec sa Gitane lui à qui la médecine offrait (au mieux alors) six mois à vivre – là, ses lunettes et son sourire, sa façon d’être, sa douceur sans doute mais son mutisme aussi – costume à Paris pendant les soldes d’hiver, rue de Sèvres, nous restions seul.es à la maison, ils y allaient ensemble, je crois bien en train mais peut-être pas – elle y allait plus souvent que lui en train, revenait avec des sandwichs qui rappelaient des temps déjà anciens lointains toujours présents et ravivés par ces variantes, ce thon ces olives – œuf dur – piquant (on ne disait pas harissa, on disait « du piquant » – on riait et on pouffait parfois)
La beauté qui habite la ville
Nous avons beaucoup à (te) dire
il s'est surtout agi de tenter de garder le regard porté sur ce petit bout de presqu'île - sans s'en laisser trop disperser par les incipits de la consigne qui parlent d'eux-mêmes j'ai l'impression - en règle générale d"ailleurs, la consigne peut agir en embrayage embrayeur starter et autres bidules propres à faire avancer la connaissance qu'on parvient à dévoiler de ce lieu-là - mais pas à ces époques-là - la maison se situait (se situe toujours) avenue Didon (là où est figuré le théâtre romain (c'était le nom de l'avenue alors) la route qui menait à la plage (petits cailloux tout ça) passait immédiatement au sud des ruines des termes d'Antonin - je termine par une image trouvée dans le livre L'empreinte (Michel Valensi, L'éclat poche 46, 2021)
Faire tenir autant de choses en quelques lignes et images m’impressionne beaucoup …d’autant que Carthage c’est un peu comme Zanzibar …rien qu’à prononcer les mots c’est déjà un voyage
j’adore cet aspect documentaire que tu apportes dans le 1, ce zoom progressif qui nous donne à voir
ton 2 me ramène au cauchemar des touristes en camping car coincé dans ma rue
et j’aime l’ajout des pronoms dans les titres entre parenthèses…
quelle balade !
Toujours ces beaux textes amples, développés, documents et foule de détails du quotidien…
Tu nous fais voyager, Piero, et pas qu’un peu !!
Merci. Beaucoup.
J’aime vraiment beaucoup toutes ces cartes et photographies, et le dernier texte qui me ramène à tant de souvenirs (l’ascenseur, cette description incroyable), le ton peut-être, un état comme d’espoir toujours en suspens, glissant, et à la fois totalement ancré dans chaque vision. vertige de la réception
Grand merci Pierre !
Des leçons d’anglais aux gitanes condamnées par la science. Le boulevard Jourdan ( il y a le tram à présent) l’ascenseur à clair voie et la panthère noire de la cheminée . Son mutisme aussi. .. les sandwichs piquants les mêmes pas les mêmes . Le voyage dans le temps des cartes …