Rue de Pessac j’ai traversé le minéral givré. Le vent claque, le froid mord. Un air entêtant. Que d’arbres poussent dans ce beau Pays, notre domaine ! T’en souviens-tu, chanson de Puck ? J’entends le murmure des voyelles. J’ânonne : Chêne, Épine et Frêne. Le vent attaque le froid au corps. La ville moderne est celle de la mobilité vélocipède, du retour cyclopédique. J’ânonne. La chaîne file ; je freine. Le cycle de Beau de Rochas casse le rythme de la ville nouvelle. Les engins à moteur grondent, menacent, vestiges d’un autre monde. La chaîne file. Le chêne en argile. L’épine voit la ville à son crépuscule. Cloaque sans arbres. Costedoat. Ville dieu. Victoire. Contrescarpe. Capucins. Clare. Canteloup. Ni carpe, ni loup, ni dieu. Le décor surgit : la flèche Saint Michel tend son apothéose. Point n’est besoin d’orage. La flèche traversante perce le ciel clair. Ni aulne, ni frêne. Des puces Saint Michel, vestiges d’un monde usé, s’alignent en farandole. Le minéral déballe, le végétal s’égare. Une heure de ma vie dans les personnes en masques ; une heure de ma vie dans la foule anonyme. Ânonne l’hymne, sans masque. Gros plan – Paysage : une rivière traversante perce les roches, la moquette claire de l’herbe embuée. Frissons. Sans chêne, épine ou frêne. Des bouleaux dansent au rythme d’une campagne nue. Plan large : des personnages en toques déclinent l’invitation des sacs à gravats. Sans grand déballage. Des tentes s’affolent. Des toiles grises. On lit : la morale est un liquide verdâtre. Ville Polis. Gros plan – Objet : un cricket vert de gris. Pour dix euros, il chante. Pour cinq euros. Le commerce n’attend pas. Comme les engins à moteur qui freinent la mobilité vélocipède, il rugit la vitesse. Le monde moderne n’attend pas. Ma ville, polis. Moralité. Se mettre au vert. Éviter l’âtre. Chercher l’ancien, la seconde main – l’impair ? Je reste moderne, je suis vintage. Hors d’âge. Le commerce n’attend pas. La morale corrodée change de couleur. Pour être résolument moderne. Se mettre au vert. Dans l’âtre. Bouleaux dansants bordant rivière traversante. En flèche. Rêve de moquette. J’ânonne Puck : c’est Chêne, Épine et Frêne. Notre domaine. On lit : Après la pluie le beau temps. Après la nuit le chaud temps. Le froid claque. Librairie Hachette. Gros plan – Mise en scène d’objets : la scie de l’homme des bois dressée sur la Mappe Monde. Traversante l’espace cartographié. Dents fourchues, œil hagard. Des arbres. Se mettre au vert. Moralité. On lit : Mappe Monde qui représente les deux hémisphères savoir celui de l’Orient et celui de l’occident tirée des quatre cartes générales de feu le professeur Haelius. On n’invente pas le réel. Toujours dans la tête l’ébullition des rainettes. Le murmure des voyelles. Chêne, Épine et Frêne. Le grouillement accélère, la morsure fige. Je pense : un tison pour chauffer tes deux pieds vi-olets. J’entre. Espèce d’âtre. On lit : Reconnaissances dans le passage. Un regard un sourire. Sans masques. Évaporation du réel. Le décor s’effondre. Une heure de ta vie. Voix chaude d’épine et frêne. Non, ce ne sont pas jouvenceaux. Et je n’en prise aucun si haut.