DEVANT

DEVANT qu’est ce qu’on peut en dire qu’est ce qu’on peut dire de ce mot flou comme une vitre sale ce mot qui ne dit rien de tout ce qu’on a DEVANT qu’est ce qui nous attend DEVANT, qu’est-ce qui brille de loin depuis là-bas et nous aspire comme la perle dans le soleil attire les pies ce qui est DEVANT nous pousse dans le dos comme le mistral un matin de juin quand on remonte la corniche le long de la mer DEVANT c’est ailleurs et c’est bien loin d’ici et c’est pour cela que DEVANT c’est glam un peu plus glam que le présent le DEVANT nous déglingue un peu l’horloge intérieure du coup pourtant DEVANT c’est peut-être au fond le plus visible et en même temps DEVANT c’est mou c’est quoi l’horizon des pluies la lisière des forêts d’avenir la fenêtre sur le vide et la nuit DEVANT c’est l’informe mais on y va tout droit oui c’est flippant et pourtant on y court on s’y vautre on crie DROIT DEVANT on est à l’abordage permanent d’un DEVANT on s’élance on oublie tout ce qu’il y a derrière on est nu et on s’élance sans arme on espère qu’on ne sera pas seul DEVANT quand on regarde bien on court au DEVANT on ne sait pas de quoi mais il nous faut la course et il nous faut un DEVANT on y va nu on a confiance sans savoir ce qu’on y trouvera car DEVANT c’est ce qui fuit la mort d’ici et c’est ce qui ouvre ce qui luit ce qui nuit ce qui rit et DEVANT c’est encore à venir c’est l’a priori je veux dire c’est ce qui commence recommence ce qui aspire DEVANT inspire insuffle c’est le souffle des naseaux d’un buffle puissant DEVANT souffle et danse comme un chamane DEVANT c’est l’espace du chamane c’est la tente du sorcier c’est le domaine du sourcier dans le mirage sableux de l’horizon DEVANT c’est la dune de ce que j’ai à être c’est encore un peu de temps à être c’est la preuve que je ne meurs pas DEVANT c’est l’espace qui m’est encore donné et la vitesse de la foulée à calculer chaque matin quand tu ouvres la fenêtre et regardes DEVANT juste là ou au loin c’est pareil c’est un même domaine DEVANT c’est le royaume des vivants qu’est ce que je peux dire à part qu’ici DEVANT j’ai la ligne claire d’un champ sous la portée des arbres et une rivière à traverser et un coeur jumeau tout proche et une table où écrire tout ce qui viendra DEVANT comme on pousse une porte quand l’écriteau dit ouvert ou comme on défait les côtes de sa propre cage et que l’on fait entrer demain dans son demain thoracique qui est fait de vent et quand DEVANT on trouve l’herbe d’ailleurs qui est bien plus verte alors on sait que demain s’ouvrira comme un chemin forestier