C’est le trou entre les tours blanches qui en bordent les coins, c’est un trou et ça ramène loin. De la continuité des branches plus basses et du sol au fond, tes pieds qui frottent presque leur plafond. Ce n’est pas un mais plusieurs et peut être cent. Tapis réunis là, foisonnant, qui éclosent. C’est le carré vert sur fond blanc, sur fond gris, sur fond d’une vie ici. La première fois c’est le choc de l’endroit et plus tard les retours, au bord du trou comme on va au musée, comme on vérifie si la toile est toujours là, toujours stable, pas bougé ou a quel point elle ou nous a déjà changé. Retour au trou année après année. Dans des étés ou des cols bien roulés. Et les arbres qui eux n’ont toujours pas bougé. Les arbres dans le trou et le verre autour. Les vitres qui donnent sur le trou et les arbres dedans. Ce que ça veut dire de penser aux arbres d’ici, aux arbres poussiéreux de la ville, aux arbres du trou, alors qu’on a grandi dehors. Ce que ça veut dire d’avoir vingt ans au bord du trou, mais un trou vert finalement. C’est le premier immeuble de logement à côté et les traces du bois, des peintures en fenêtre. C’est revenir encore et constater que la forêt urbaine, autour s’agrandit mais que le trou lui n’a pas bougé. Que les arbres n’ont pas changé, à peine grandi. C’est parfois fantasmé d’avoir vu la chèvre qui descend parmi les feuilles et chercher l’œil du dinosaure affamé. C’est revenir serein, ne pas y retourner. C’est y manger, y longer le cinéma où l’on n’entre plus jamais. C’est constater. Retrouver le bus bleu de la banlieue, la trace des pas le long de l’eau qui là-bas fait comme la mer. Remonter les marches blanches. Retrouver les arbres dans le trou. Remonter les années.