SOUVIENS fou flou rêve vrac craque croque crache mâche toutes mes dents SOUVIENS bouche bulles embrouillées bouillie SOUVIENS vois-tu en rêve? – mouches enfant rouge sable et eau ( Alan ? ) SOUVIENS rouge affamé rampe enfant ver ? SOUVIENS mille morceaux rêve-voix – vois-tu ? – mer tessons de feu, dessus dessous cadavres allumettes mêlés tordus noyés noués ébène bois flotté SOUVIENS monde en monceaux moi brisé à mille moitiés moisi à mille moitiés moi ici moi en bribes balbutie bégaie moi moi moi SOUVIENS mes images en miettes confuses, je l’entendais : petit petit petit petit – la cavalcascade ronde et dorées –petit petit petit la grand mère vieille et noire, poche du tablier noué sur le ventre, réserve à grains – petits petits petits – ils rebondissent et disparaissent sous le bec pointu des poules dandineuses, petit petit petit mon – ton – vois-tu –ton – rêve ? – SOUVIENS ? SOUVIENS vrac rêve crève crache dents SOUVIENS vol léger sur terre bleue voile mousseline, SOUVIENS hommes minus gratteurs creuseurs fouisseurs SOUVIENS grotte échos calcifiés du temps compte-goutte SOUVIENS humains éjectables substituables usés indifférents SOUVIENS memento mori SOUVIENS mais mais maismento quand la vie ? je SOUVIENS toi-moi chacun son tour sur les chevaux de bois la girafe le carrosse l’avion ras du sol, je SOUVIENS toi moi toi tu montes moi je descends la sirène visse à travers mes oreilles sa longue langue ronde et sucrée SOUVIENS manège volant vibre gronde mains excitées SOUVIENS mourant râle dernier de gorge SOUVIENS drap blanc visage blanc blanc SOUVIENS pompon gifle visage tentacules – pleure pauvre pieuvre violette SOUVIENS rester assis mais papaman l’attraper ? – attention ! SOUVIENS SOUVIENS les les les bouts de moi épinglés mamanpa yeux banderille je SOUVIENS les les laids bouts de moi arrachés d’un trait sec, leur trace en pointillés, les dé dé dé bris pochoir flou des bords de pansements je SOUVIENS les mots équarrisseurs entaillent tout de moi, le vrai le comment le pourquoi SOUVIENS rien avant entendre sentir parler mais quand même aussi, SOUVIENS la neige et sa boue la fumée des bouches à flanc de cimetière et plus bas le trou des SOUVIENS plus rien et SOUVIENS la fumée des maisons, SOUVIENS les usines aux cheminées sans fumée SOUVIENS le mal de mai mais je SOUVIENS heureux d’amour soleil brûle ciel, mes os étaient légers – ma chair transparence, claire comme l’eau de l’air autour, ma vie d’évidence insoupçonnée, SOUVIENS ma vie face de lune sur l’étang miel et fiel
Le mot emporte tout… Souviens… et c’est comme si chaque mot du texte générait le suivant… M’est venue l’image d’un petit garçon tirant à lui un drap couvert de mots sous lesquels il tentait de s’abriter…
Superbe texte. Le rythme. Les mots qui écorchent ou adoucissent un quelque chose. Et les chevaux de bois… ce que ça fait remonter à soi comme souvenirs.